Les premières Assises des dérives sectaires

Annoncées à l’automne 2022 par Sonia Backès, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, chargée de la Citoyenneté, les Assises nationales de la lutte contre les dérives sectaires se sont tenues au ministère de l’Intérieur les 9 et 10 mars 2023. Elles constituent un événement politique majeur et le début d’une politique étatique concernant le phénomène sectaire.

Durant ces deux journées étaient réunis tous les acteurs œuvrant à aider les victimes et lutter contre les dérives sectaires : à savoir l’essentiel des acteurs étatiques concernés par la problématique, les associations, les chercheurs, journalistes, lanceurs d’alerte, représentants des plateformes numériques, des victimes mais aussi des instances politiques provenant de différents ministères ou des parlementaires. Au programme du vendredi, sept ateliers regroupaient les différents acteurs autour de plusieurs thématiques pour définir une feuille de route comprenant des mesures concrètes. Les thématiques étaient les suivantes :

-faire évoluer le droit et les réponses judicaires

-renforcer la coopération interservices

-consolider le partenariat entre l’Etat et les associations

-mieux accompagner les victimes

-renforcer la lutte contre les dérives sectaires en Europe

-lutter contre les dérives sectaires sur Internet

-déconstruire le discours complotiste pour mieux lutter contre les dérives sectaires.

L’Unadfi a pu participer à certaines de ces commissions qui permettront à l’Etat de mettre en place une politique solide concernant le phénomène sectaire en suivant les différentes pistes de travail et propositions émanant de cette journée. Dans son discours de clôture, Sonia Backès a précisé qu’une feuille de route interministérielle sera officiellement présentée « avant l’été ». Le plan sera porté par la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes), qui verra son effectif passer de 12 à 15 personnes.

Sonia Backès a par ailleurs présenté les 3 axes principaux de sa politique ainsi que certaines propositions qui devraient être mises en place.

Le premier axe est celui de la prévention. La secrétaire d’Etat rappelle très justement qu’ « il est sans doute plus facile d’empêcher des gens d’entrer dans ces phénomènes sectaires que de les en faire sortir ». Le but est donc clairement affiché : que le moins de personnes possibles entrent dans un mouvement sectaire. Sonia Backès a présenté un certain nombre de propositions : une campagne nationale pour prévenir des risques d’une dérive sectaire, la signature d’un partenariat entre la Miviludes et les plateformes numériques afin de faire de la prévention notamment en formant les modérateurs ou en utilisant les algorithmes pour fournir des contenus vérifiés à caractère scientifique et en communiquant une information fiable. La Miviludes pourra demander le retrait de contenus illicites et signaler les contenus dangereux.

Le deuxième axe concerne l’accompagnement des victimes. Elle souhaite que les signalements se fassent plus simplement et envisage une territorialisation de l’aide avec un partenariat formalisé entre la Miviludes et les associations. Son objectif est que les victimes sachent à qui s’adresser. Partenaires de confiance de la Miviludes, les associations pourront effectuer des signalements auxquels la Miviludes devra répondre dans les 48H. Les préfectures et les différents secteurs ministériels dans chaque département devront aussi être vigilants sur les phénomènes qui existent sur leur territoire. Autre point celui de l’indemnisation des victimes. La ministre entend travailler avec le ministère de la Justice afin qu’elles puissent bénéficier du Fonds de garantie des victimes d’infractions. Elle envisage la formation de nombreux acteurs à la problématique sectaire notamment la police, la justice et différents maillons territoriaux de l’Etat.

Le troisième axe est celui de l’évolution du dispositif législatif. Durant ces Assises, Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la Santé et de la Prévention, chargée de l’Organisation territoriale et des professions de santé, a souhaité la mise en place d’un dispositif permettant d’encadrer les pratiques de soins non conventionnelles et la création d’un « comité d’appui » sur le sujet qui réunira des experts et des acteurs associatifs. D’un point de vue législatif un texte pourrait aboutir à la création d’un délit d’incitation à l’arrêt d’un traitement en cas de maladie grave. La sujétion psychologique pourrait devenir une circonstance aggravante pour certains délits et crimes et les sanctions pour les abus de faiblesse pourraient être durcies. 

(Sources : L’Express, 09.03.2023 & Ouest France, 09.03.2023 & La Croix, 10.03.2023 & Le Figaro, 10.03.2023 La Gazette des communes, 13.03.2023 & Charlie Hebdo, 15.03.2023 & Ministère de l’Intérieur& Discours de clôture de Sonia Backès, Assises nationales de la lutte contre les dérives sectaire, 10.03.2023)

Voir le discours de clôture de Sonia Backès : Lien vers la vidéo : https://twitter.com/Interieur_Gouv/status/1634214774568304640?s=20

  • Auteur : Unadfi