Il n’y a pas de recette miracle pour venir en aide à une victime de sectes. « La réponse est toujours unique et dépend du contexte » estime Suzanne Newcombe, directrice d’Inform1, reconnue pour ses recherches sur l’histoire moderne du yoga et des religions nouvelles et minoritaires. « Mais il y a des facteurs importants à prendre en compte », détaille-t-elle dans The Conversation.
Suzanne Newcombe pose d’emblée un postulat : personne ne décide jamais d’adhérer à une secte. Au départ, l’envie de rejoindre un groupe semble répondre à un besoin ou à un idéal. Des témoignages d’anciens membres évoquent ensuite avoir subi un contrôle démesuré sur tous les aspects de leur vie. Le groupe sectaire classique encourage à s’éloigner de sa famille, ses amis, voire de son emploi. Certaines personnes changent alors brusquement d’avis lorsque le groupe sectaire franchit une ligne éthique ou lorsqu’elles se rendent compte de la duplicité de l’enseignement et du comportement d’un leader. Mais le déclic ne suffit pas. Plus vous êtes engagé et plus il devient difficile de partir. Si vous avez dépensé toutes vos économies, il va falloir tout recommencer à zéro. Et si vous avez été victime d’activités néfastes tout en y contribuant, il y a, en plus, un sentiment de honte et une stigmatisation sociale. Une étude récente montre « qu’un effort émotionnel considérable est nécessaire pour créer de nouveaux liens et une nouvelle compréhension de soi ».
Le poids des mots et du lien social
Suzanne Newcombe en est persuadée : l’intervention d’une personne extérieure peut aider à protéger quelqu’un d’un endoctrinement mais il est primordial de surveiller son langage. Il faut essayer de maintenir un contact positif, ne pas dévaloriser la personne et poser des questions sans juger. On ne dit pas à une personne enthousiaste de rejoindre un groupe qu’elle a subi un lavage de cerveau par exemple. Les membres d’une secte sont souvent avertis que les personnes extérieures ne peuvent pas comprendre les convertis. Les froisser pourrait donc renforcer leur croyance.
Et cette vigilance reste de mise avec une personne partie d’un groupe. Certains peuvent se distancer physiquement du groupe mais conserver des aspects de son idéologie et même certaines pratiques pendant de longues périodes. Des personnes quittant une secte peuvent avoir besoin de temps et d’espaces sécurisés. Dans la mesure du possible, il est préférable de le faire avec l’aide d’un conseiller professionnel.
Des différentes expériences qu’elle a pu recueillir, Suzanne Newcombe tire une conclusion : les groupes sectaires montrent à quel point les liens sociaux sont puissants, à la fois pour attirer les gens dans ces groupes et pour les aider à s’en retirer.
(Source : The Conversation, 13.12.2023)
1.Organisme de bienfaisance qui recherche et fournit des informations sur les religions et spiritualités nouvelles et minoritaires en utilisant la méthodologie des sciences sociales et études religieuses au King’s College de Londres.