Une nouvelle stratégie de lutte contre les dérives sectaires

La secrétaire d’Etat Sabrina Agresti-Roubache a présenté, ce mercredi 15 novembre, la stratégie nationale pour lutter contre les dérives sectaires. Son projet de loi vise à instaurer de nouveaux délits qui prennent en compte la mutation du phénomène sectaire.

Le dernier rapport de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) a fait ressortir une augmentation de 33 % des signalements entre 2020 et 2021 et plus de 86 % entre 2015 et 2021, soulignant également une évolution des modes opératoires et pointant Internet comme un terreau favorable. Des données corroborées lors des Assises nationales de la lutte contre les dérives sectaires qui se sont tenues en mars 2023. En réponse, la nouvelle stratégie nationale vise à mieux mobiliser les pouvoirs publics autour de trois axes : la prévention, l’accueil et l’accompagnement des victimes et le renforcement de l’arsenal juridique.

Deux nouveaux délits

Principale innovation : le délit de « sujétion psychologique ». 22 ans après la loi About-Picard, qui a notamment permis de réprimer « l’abus de faiblesse lié à un état de sujétion psychologique ou physique principalement à des fins de captation financière », le gouvernement veut aller plus loin et en faire un délit autonome. Pourront ainsi être réprimées « les personnes exerçant des pressions graves ou réitérées ou utilisant des techniques propres à altérer le jugement », les peines pouvant aller jusqu’à 3 ans de prison et 375 000 € d’amende. Une circonstance aggravante visant cet état de sujétion sera prévue pour plusieurs délits, comme les violences ou l’escroquerie, quand ils sont commis dans un contexte sectaire. « Ce projet de loi permet de changer la focale et de se concentrer davantage sur le gourou, et ses manœuvres destinées à mettre la victime sous sa coupe, que sur la victime elle-même » se réjouit Catherine Katz, présidente de l’UNADFI. « Ce nouveau prisme devrait faciliter les poursuites ».

Alors que 25 % des signalements remontés à la Miviludes concernent le domaine de la santé, le texte prévoit aussi de créer un délit de « provocation à l’abandon ou à l’abstention de soins ou à l’adoption de pratiques exposant à un risque grave pour la santé ». La peine serait d’un an d’emprisonnement et 15 000 € d’amende. De quoi répondre aux nombreux cas où des figures du complotisme et diverses pratiques de soins non conventionnelles suggèrent, par exemple, d’abandonner les traitements contre le cancer.

Sanctions disciplinaires facilitées

Le texte de loi, qui compte une quarantaine de mesures, devrait aussi faciliter les sanctions disciplinaires pour les praticiens déviants. Les Ordres professionnels de santé seront ainsi obligatoirement informés par les parquets des condamnations de professionnels soumis à leur contrôle.

Le projet devrait passer par le Sénat puis l’Assemblée nationale dans les prochains mois. Il ne prévoit pas, en revanche, de nouvelles sanctions contre les grandes plateformes comme Google ou Facebook, « cette question relevant du règlement européen sur les services numériques » a indiqué le cabinet de la Secrétaire d’Etat. 

(Sources : Localtis, 15.11.2023 & La Croix, 15.11.2023 & France Info, 15.11.2023 & L’Express, 15.11.2023)

  • Auteur : Unadfi