Canada / Psychothérapeutes abusifs : prévention

Au Québec, la loi 21 obligeant toute personne à détenir un permis pour exercer la psychothérapie est entrée en vigueur en juin 2012. Tout en permettant à d’autres professionnels que les psychologues d’ac¬céder au titre de psychothérapeute, cette loi est suffisamment exigeante pour inciter les candidats à acquérir le titre par la voie classique de formation de psychologue.


Un an après la promulgation de cette loi, l’Ordre des psychologues du Québec vient d’entamer une vaste campagne d’information pour alerter la population sur les risques que représentent le recours à un praticien non autorisé.(1) Tout d’abord, en diffusant une publicité télévisée « percutante et imagée ».(2) Ce spot publicitaire met en scène un personnage insouciant et peu habile « entrant dans une pièce représentant l’intérieur d’une personne, sa fragilité, son histoire, sa tête ». Le personnage casse un par un les objets fragiles qui emplissent la pièce. Cette métaphore pour signifier que l’absence de formation constitue en elle-même un danger, symbolisant « les ravages que peut subir une psyché fragile lorsqu’on s’y aventure à l’aveuglette ».

Dans le même temps, l’Ordre a mis en ligne un site, votretete.ca. L’accroche est éloquente : « Ne laissez pas n’importe qui entrer dans votre tête ». Ce site permet d’accéder à l’annuaire des praticiens autorisés et insiste sur les éléments qui doivent susciter la méfiance : promesses de résultats, supposé « pouvoirs »… Il propose également des réponses aux questions les plus fréquemment posées : qu’est-ce que la psychothérapie, qui est autorisé, comment reconnaître une fausse psychothérapie, quels sont les risques à consulter une personne non autorisée, que faire en cas de pratique illégale…

Le site insiste sur le fait que la psychothérapie est « une démarche importante » dans la vie et qu’il faut s’assurer de « consulter un professionnel autorisé par la loi » avant de l’entamer.

La présidente de l’Ordre, Rose-Marie Charest rappelle que « L’exploitation peut être financière, mais elle peut aussi être affective ».

C’est l’Ordre des psychologues du Québec qui a autorité pour délivrer les nouveaux permis, exercer une surveillance sur la pratique illégale de la psychothérapie. Il a également en charge d’encadrer la pratique des 500 professionnels qui ont reçus le permis dans le cadre de l’application de la loi mais qui n’appartiennent à aucun ordre.
Pour signaler l’évènement, la journaliste Marie- Claude Malboeuf, auteure d’une grande enquête Gourou inc.(3), rappelle que 300 psychothérapeutes sont actuellement dans la ligne de mire de l’Ordre des psychologues du Québec. Ces praticiens reçoivent encore des clients alors qu’ils ne détiennent pas d’autorisation, ce qui est parfaitement interdit depuis la mise en vigueur de la loi 21. Depuis la publication de ce dossier, l’Ordre s’est associé au Collège des médecins pour convaincre le Québec de durcir la loi afin que « les poursuites (contre les charlatans) soient plus efficaces et plus pénalisantes » et pour « qu’ils arrêtent de recommencer ». Mme Charest a indiqué que l’Ordre « ne laissera pas tomber ça dans le vide ».

(1) Lire pour rappel « Législation sur la pratique de la psychothérapie : après la France, le Canada et la Belgique » accessible sur le site de l’UNADFI
(2) Visionner la publicité
(3) Pour rappel : Marie-Claude Malboeuf est la journaliste qui a mené une grande enquête sur les gourous. Ce dossier édifiant, publié en 2012, est constitué de plusieurs témoignages dans lesquels les victimes ont raconté comment des charlatans les avaient conduites au bord du gouffre : dépenses folles, viols, séjour en psychiatrie, quasi-suicides… D’une grande qualité, ce dossier dont nous nous étions déjà fait l’écho (Actualités d’octobre 2012 et sur le site de l’UNADFI), a été évoqué par la commission d’enquête du Sénat en avril dernier.

Source : votretête.ca & lapresse.ca, 07.10.2013