Les gourous de l’alimentation

De nombreux gourous populaires sur internet donnent des conseils alimentaires, encouragent leurs adeptes à suivre des cures, des jeûnes, ou assurent la promotion du crudivorisme ou de l’instinctothérapie. Leurs conseils pour maigrir, améliorer son bien-être ou encore se soigner peuvent s’avérer dangereux quand des personnes se détournent de leurs parcours de soins.

Environ 40% des signalements de nos associations ou de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) concernent la santé et le bien-être. Bien souvent l’alimentation est au cœur des théories et des doctrines professées par des mouvements sectaires ou des praticiens de PSNC (pratiques de soin non conventionnelles). Des familles s’inquiètent d’un changement brutal de comportement alimentaire d’un de leurs proches et d’un discours qui a pu se radicaliser. Pascale Duval, porteparole de l’Unadfi, rappelle que les mouvements hygiénistes ont explosé depuis quelques années et certains régimes alimentaires se sont démocratisés. Suivre les conseils de certains gourous de l’alimentation peut présenter un risque majeur de perte de chance de guérison. Pascale Duval cite l’exemple d’une famille dont le proche diminuait sa dose d’insuline sans aucun avis médical à cause de Thierry Casasnovas. Ce dernier figure parmi les plus populaires mais aussi les plus dangereux gourous de l’alimentation présents sur internet. Pour rappel il est visé par une enquête pour mise en danger de la vie d’autrui.

Sur internet, des vidéastes amateurs le plus souvent sans aucun bagage scientifique se présentent comme thérapeutes, magnétiseurs ou spécialistes de l’alimentation et dispensent des conseils. Leur audience ne cesse de grandir et la crise de Covid-19 n’a fait qu’accentuer cette tendance. Ils font de leurs régimes spéciaux des méthodes de soins pouvant guérir tous les maux. Cependant derrière un discours aux allures scientifiques, les solutions proposées par ces youtubeurs échouent face à l’épreuve des analyses scientifiques et médicales. Dans un article, l’hebdomadaire
Marianne a tenté de passer au crible d’une expertise scientifique différents régimes alimentaires promus par divers thérapeutes, et montré par exemple les risques de prolifération de bactéries dans l’alimentation crudivore. Quant au jeûne intermittent, selon Ghislain Grodard-Humbert, président de l’association française des diététiciens nutritionnistes, il n’y a aucune preuve scientifique de son bienfait, tout comme pour le respirianisme ou le crudivorisme ; ces régimes peuvent au contraire provoquer une sévère dénutrition et met en garde contre ces dangereuses croyances qui peuvent entraîner un refus de soin médical.

Pour Pascale Duval, les instigateurs de ces régimes avancent les mêmes arguments : ils prétextent que leur régime existe depuis la nuit des temps, que l’industrie agroalimentaire nous a corrompus. Ensuite ils s’érigent en maître à penser sur la base de leur propre témoignage d’avoir pu guérir sans faire appel à la science et ses chercheurs. Ils vendent de la croyance. Pour Ghislain Grodard-Humbert, peu importe l’efficacité de ces méthodes, l’enjeu est l’emprise exercée par ces charlatans. Celle-ci n’a plus besoin de présence physique, les médias sociaux parviennent à mettre rapidement des individus sous emprise, à les conduire à une rupture avec leur vie antérieure et à des pertes financières importantes.

(Sources : Le Figaro, 05.03.2021 & Marianne, 13.03.2021)

 

  • Auteur : Unadfi