En Suisse des institutions ont recours à la biodynamie

L’agriculture biodynamique a le vent en poupe, la Suisse romande n’échappe pas à cette tendance et compte de plus en plus d’adeptes. De nombreux viticulteurs y ont recours, mais aussi des structures institutionnelles comme la ville de Lausanne qui l’utilise dans ses parcs ou l’Université de Lausanne, dont le domaine agricole est exploité en biodynamie.

Pourtant le mouvement n’est pas exempt de reproches en raison de la confusion entretenue avec l’agriculture biologique et de son origine anthroposophique.

L’agriculture biodynamique repose sur les conceptions spirituelles de l’anthroposophie, une croyance ésotérique fondée au début du vingtième siècle par l’Autrichien Rudolf Steiner. Ce dernier conçoit le domaine agricole comme un organisme vivant dont il faut s’occuper en fonction des cycles lunaires, planétaires et stellaires et y administrer des préparations censées « dynamiser » les sols1.

Laurent Cordonier, sociologue travaillant sur les croyances sociales à l’Université de Paris- Diderot et ancien collaborateur à l’Université de Lausanne, « trouve grave que l’Université de Lausanne associe son nom à une pratique ésotérique » liée à l’anthroposophie qu’on retrouve souvent derrière des mouvements anti-vaccins. Il regrette que « l’Université donne ici un gage de qualité et de sérieux à quelque chose qui n’a rien à faire là. »

Il déplore également que les consommateurs n’aient pas « conscience de ce qu’il y a derrière la biodynamie, que ce soit l’anthroposophie ou les pratiques ésotériques ». Mais du côté des producteurs, cela ouvre un marché intéressant. L’anthropologue des religions Alexandre Grandjean, qui réalise sa thèse à Lausanne sur l’implantation de la biodynamie chez les viticulteurs romands, constate une adaptation de leur pratique et « un détachement par rapport aux conceptions de Steiner sur l’agriculture ».

Contrairement à Steiner qui prône la polyculture et l’auto-suffisance, les vignerons pratiquent la monoculture, et « surtout produisent une boisson alcoolisée non-essentielle selon l’anthroposophie. »

Mais si la pratique a le vent en poupe, son efficacité n’a toujours pas été prouvée scientifiquement. La majorité du temps les agriculteurs mettent en avant leurs propres expériences personnelles. Laurent Cordonier rappelle « que de telles expériences personnelles ne peuvent être mises au même plan qu’une étude basée sur la méthode scientifique, car elles ne permettent pas de distinguer un possible lien de causalité d’une simple coïncidence. »

Deux études scientifiques menées en Suisse, l’une commencée en 1978 et l’autre en 2002, ont montré des rendements similaires pour l’agriculture biologique et l’agriculture biodynamique. Étudiant l’effet des préparations biodynamiques, la seconde étude a conclu qu’elles n’ont pas de portée significative sur la qualité des sols et ni sur les rendements.

Comparant ces préparations à de l’homéopathie, Laurent Cordonier conclut : « On sait depuis 20 ans que cela n’a aucun effet et pourtant on en vend toujours. »

(Source : Heidinews, 15.03.2021)

1- Au sujet des préparations
utilisées en biodynamie voici ce
qu’en dit le site Biodynamie Pays
d’Oc : « Quatre des six préparations
du compost subissent un processus
de fermentation au cours de l’hiver,
dans une enveloppe animale,
enterrée dans le sol. Cela après
qu’elles aient été exposées aux
forces de l’été, partiellement
suspendues. Une vessie de cerf est
utilisée comme enveloppe pour les
fleurs d’achillée millefeuille (502),
un intestin grêle de bovin pour la
camomille (503), un crâne d’animal
domestique pour l’écorce de chêne
(505) et un mésentère de vache
pour le pissenlit (506). »

(Source : http://biodynamiepaysdoc.com/les-preparations-bio-dynamiques )

 

 

  • Auteur : Unadfi