Italie / les sénateurs italiens alertent leur gouvernement

Le Sénat italien a engagé une réflexion sur la nécessité de créer une loi semblable aux lois française et belge sur l’abus de faiblesse.


Dans sa séance du 6 décembre 2012, le Sénat s’adresse aux Ministres de l’Intérieur, de la Justice, , de l’Education, des Universités et de la Recherche, et de la Santé. Il relève un certain nombre d’observations au vu de l’inquiétante propagation des sectes religieuses en Europe. Il cite les différentes initiatives qui ont fait évoluer la perception du phénomène sectaire en Europe et demande quelles mesures les ministres en fonction pensent adopter par rapport aux diverses Recommandations du Conseil de l’Europe.

Ainsi, dès 1999, la Recommandation 1412 du Conseil de l’Europe, incitait les Etats membres à surveiller les groupes religieux, ésotériques ou spirituels à caractère sectaire. La Recommandation invitait également à réaliser des campagnes d’éducation et d’information dans les écoles. La Recommandation rappelait enfin le rôle des Organisations non gouvernementales (ONG) qui apportent une aide à la fois aux victimes et à leurs familles et elle lançait l’idée de la création d’un Observatoire européen conçu pour faciliter les échanges entre les centres nationaux.

Une autre recommandation (n° 1804) datée de 2007, abordait la liberté de religion. Une liberté qui n’est cependant pas illimitée puisque la pratique d’une religion qui ne respecte pas certains droits fondamentaux est inacceptable. Les Etats doivent donc exiger des responsables religieux qu’ils prennent une position sans ambiguïté concernant la priorité des droits de l’homme sur les principes religieux, selon les textes de la Convention européenne des droits de l’homme.

Plus récemment, le 5 octobre 2012, dans le cadre de la Conférence des Organisations internationales non gouvernementales (OING) du Conseil de l’Europe, les représentants de la Commission des droits de l’homme avaient exprimé leurs préoccupations sur le fait que les Etats membres n’aient pas pris des mesures pour lutter contre les dérives dans les domaines de la santé, de l’éducation, de la vie privée et familiale, ce qui est préjudiciable aux droits de l’homme et aux principes fondamentaux de toute société démocratique. Les représentants de la Commission des droits de l’homme avaient souligné que le phénomène sectaire avait continué à prendre de l’ampleur dans les pays d’Europe Centrale et Orientale et qu’il n’avait pas diminué dans les pays d’Europe Occidentale. Jusqu’à présent, seules la France et la Belgique ont adopté des mesures législatives visant à protéger les citoyens les plus vulnérables tandis que quelques autres Etats membres en sont encore au stade de l’observation et de l’information.

Le Sénat rappelle que dès 2002, la France avait créé une Mission interministérielle pour surveiller et lutter contre les dérives sectaires. Cette Mission qui a un rôle d’information auprès du public, publie des rapports annuels ainsi que de nombreuses publications et guides, tous accessibles sur internet.

De son côté, le 22 mars 2012, le ministère français de l’Education Nationale a diffusé une circulaire de prévention contre le risque sectaire à l’attention des rectrices et recteurs. Enfin en octobre 2012, le Sénat français a jugé nécessaire de mettre en place une commission spéciale chargée d’enquêter sur les dérives sectaires dans le domaine de la santé.

Le Sénat italien observe également qu’en septembre 2012, les rapporteurs de la Commission des questions juridiques et des droits de l’homme de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) réunie à Paris pour discuter de la protection des enfants, avait montré la difficulté de parvenir à un consensus. Cela ne signifie pas cependant qu’il faille renoncer à mettre en place des règles et des politiques communes au niveau européen pour protéger les enfants contre les abus des sectes et contre toute forme de négligence ou de violence. Prenant en compte la vulnérabilité des enfants et des adolescents, les représentants des Etats participant à la conférence ont réaffirmé une nécessaire vigilance sur ce phénomène, notamment par la création d’une structure similaire à la Mission interministérielle française.
En Italie, seule la région du Frioul-Vénétie julienne a promulgué le 31 mai 2012 une loi régionale intitulée « Normes pour le soutien et la pleine liberté intellectuelle, morale et psychologique de l’individu » (Norme per il sostegno e la piean libertà intellecttuale, morale e psicologica dell’individuo.

A ce jour, seules les associations privées et bénévoles font, malgré leurs ressources limitées, un précieux travail et dispensent des informations sur le phénomène sectaire tout en apportant un soutien aux victimes et à leurs familles. Ces associations compensent le manque d’action du secteur public en assurant un service totalement gratuit tout en prenant conseil auprès d’experts dans les domaines de la santé, de la criminologie, de la psychologie et du droit. Ainsi l’Association des familles de victimes, FAVIS, a lancé une première initiative en Italie en publiant une brochure de prévention « Les mains sur la tête », distribuée gratuitement aux lycéens d’écoles secondaires dans la province de Rimini.

Les efforts déployés par les associations de défense et leur coopération active avec la police ont abouti à la condamnation de gourous. Par ailleurs, certains représentants d’associations ont été auditionnés par le Comité Justice du Sénat sur la thématique de la manipulation mentale envers les plus faibles avec une référence particulière au phénomène sectaire. Leur contribution au projet de loi n°569 sur la manipulation mentale a eu pour résultat de provoquer à leur encontre une campagne accusatrice et diffamatoire sur internet. Des accusations non fondées et insultantes destinées à les discréditer ont été lancées ad personam : contre les responsables d’associations de défense auditionnés mais aussi contre des membres de l’équipe engagée dans la lutte contre les sectes au Ministère de l’Intérieur et contre des personnalités politiques. Une ancienne adepte de la Scientologie, Mme Maria Pia GardiniMarie Pia Gardini est décédée au cours du week-end du 22 septembre 2012. Elle avait combattu la Scientologie après y avoir adhéré. Lire ses révélations sur le site antisectes.net : [« Moi, ancienne prêtresse de la Scientologie ».]] a elle aussi été « attaquée ».…

Devant cet état de fait, il est demandé aux ministres en place ce qu’ils comptent entreprendre pour la prévention en milieu scolaire et médical et s’ils mettront en place, à l’exemple de la France, une mission interministérielle d’observation et de lutte contre les dérives sectaires. Enfin, il leur est demandé s’ils sont informés des campagnes de diffamation contre les associations et contre leurs membres et surtout, comment ils comptent agir pour aider les victimes et leurs familles qui se tournent vers ces associations.

Pour conclure, le texte du Sénat rappelle les paroles du président de la République à l’occasion de la célébration de la journée du bénévolat en 2009 qui déclarait que les actions sociales qui répondent aux besoins et aux droits des citoyens ne peuvent pas être uniquement déléguées au secteur privé.

Lire [le texte du Sénat.