
Annie Genevard, ministre de l’Agriculture, affirme que l’État ne finance pas les pseudosciences. Mais plusieurs documents, émanant justement de services de l’État, prouvent le contraire. Une partie des fonds publics dédiés à la formation professionnelle agricole bénéficie à des pratiques ésotériques.
En 2015, l’Ademe (Agence de la transition écologique) et Vivea (fonds de formation professionnelle subventionné par l’État, l’Europe et les régions) ont signé un accord cadre pour « favoriser l’appropriation de pratiques alternatives par les chefs d’exploitations agricoles ». Des efforts louables. Mais qui n’ont pas échappé aux charlatans. Le fonds Vivea a ainsi financé 155 formations de géobiologie (une pseudoscience qui prétend détecter des courants énergétiques indétectables nuisibles aux animaux) et formé 1 273 stagiaires rien que sur l’année 2021-2022.
Ces formations non conventionnelles, mais éligibles à ce type de financements, interpellent.
La Galerie du ver de terre propose par exemple « d’acquérir une vue holistique de la ferme et d’harmoniser les rayonnements cosmiques avec les plantes et les animaux » en onze petites heures. Interface élevage se focalise, lui, sur le repérage des « courants vagabonds » et des « zones pathogènes électromagnétiques ». Agrilearn, de son côté, dispense des cours sur les « taux vibratoires », ouvrant droit à des crédits d’impôts.
Le fonds Ocapiat, équivalent de Vivea pour les salariés agricoles et agréé par l’État, a, lui aussi, financé des formations… à la biodynamie ! Cette pratique basée sur les astres et des rituels est surveillée par la Miviludes. Quarante salariés ont suivi des stages, moyennant 11 000 € depuis 2022.
Bien que cela ne représente que 0,006 % des sommes engagées, ces programmes posent question.
Une mission d’inspection lancée
Et ils sont loin d’être isolés. De nombreux organismes récipiendaires d’argent public mettent en avant des formations fantaisistes centrées sur toutes sortes de pseudo-concepts, tels que l’homéopathie animale, la kinésiologie ou la « communication intuitive »… Parmi eux : des Chambres d’agriculture mais aussi des centres de formation professionnelle et de promotion agricole, l’Action de formation conventionnée, elle-même financée par France Travail, des centres d’initiatives pour valoriser l’agriculture et le milieu rural, ou encore certains groupements de défense sanitaire. A leur décharge, les plaquettes de formation sont (volontairement) floues. Elles mettent davantage en avant les techniques traditionnelles plutôt que spirituelles voire ésotériques.
Face à la polémique, le ministère de l’Agriculture a annoncé des mesures. « Une mission d’inspection a été lancée pour identifier ces dérives et s’assurer que les agriculteurs bénéficient de conseils et de formations fondées sur des bases scientifiques », affirme-t-il, assurant vouloir faire le tri et avoir déjà sommé des organismes de retirer certaines offres.
(Sources : L’Express, 21.02.2025 & RTL, 25.02.2025)
A lire aussi sur le site de l’Unadfi : Des formations ésotériques financées par des fonds publics : https://www.unadfi.org/actualites/groupes-et-mouvances/des-formations-esoteriques-financees-par-des-fonds-publics/