Bruno Comby, un crudivore candidat aux législatives

Bruno Comby, candidat LR-RN en Loire-Atlantique, ne goûte pas seulement au plaisir de la politique. Il nourrit aussi une passion pour le régime crudivore.

Bruno Comby est ingénieur polytechnicien. Et sa spécialité, le nucléaire, a séduit l’Union de la droite en Loire-Atlantique. Il est l’auteur de Le Nucléaire, avenir de l’écologie ? et défend l’idée que « l’implantation d’une centrale nucléaire bien conçue ne perturbe que très peu l’environnement ».  Projeté à Nantes, dans la 5e circonscription de Loire-Atlantique, pour les élections législatives, Bruno Comby n’en est pas à sa première élection. Il était déjà candidat à la mairie de Houilles, dans les Yvelines, en 2014. Il avait recueilli 8 % des voix et ne s’était donc pas qualifié pour le second tour.

Au-delà de la politique, la principale préoccupation de Bruno Comby est le crudivorisme. Dans plusieurs livres, il prône les bienfaits d’une alimentation crue sur la santé et l’immunité. Il va jusqu’à estimer qu’un tel régime peut permettre de lutter contre le Sida. Cette croyance l’a amené à rencontrer, dans les années 1990, Guy-Claude Burger, maître à penser de Thierry Casasnovas.  Condamné pour exercice illégal de la médecine, publicité irrégulière, escroquerie et pédophilie, ce théoricien suisse au casier judiciaire bien rempli est à l’origine de l’instinctothérapie, une pratique alimentaire qui consiste à ne pas transformer les aliments « de manière à laisser l’instinct alimentaire réguler spontanément l’équilibre nutritionnel et le métabolisme ». Au château de Montramé, en Seine-et-Marne, il partageait son expérience moyennant des sommes d’argent mirobolantes. Cette pseudoscience a été épinglée par la Miviludes dans plusieurs de ses rapports. En 2003, elle qualifiait Guy-Claude Burger de « gourou » et relèvait la condamnation en justice d’un couple d’adeptes de l’instinctothérapie pour privations de soin sur un enfant.

Aujourd’hui, Bruno Comby rejette toute association avec la « secte de Montramé ». Il nie avoir passé du temps dans le château alors que « plusieurs archives de presse relèvent qu’il y a séjourné » note Charlie Hebdo. Une certitude : le candidat de Loire-Atlantique a sollicité Jean Signalet pour écrire la préface de l’un de ses nombreux livres. Ce médecin immunologue n’est autre que l’auteur du préambule d’un livre de Guy-Claude Burger dans lequel il écrit : « J’ai fait la connaissance de Guy-Claude Burger en 1983, à l’occasion d’une conférence qu’il donnait à Montpellier. Je fus frappé par son intelligence, sa culture, la mesure de ses propos et très intéressé par la théorie surprenante qu’il présentait. » Au moment de ses procès pour exercice illégal de la médecine, Jean Signalet lui apportera même son soutien.

Un autre personnage a gravité autour de Bruno Comby : Henri Joyeux, médecin et écrivain, a signé l’une de ses préfaces… Il a été interdit d’exercice de la médecine après des propos remettant en cause la qualité du vaccin DTP.

Mais Bruno Comby l’affirme : « Je ne suis pas du tout un sectaire, un absolutiste ou un extrémiste. Même d’un point de vue politique, je suis nettement de droite mais plutôt du centre droit. Je ne suis pas du Front ou du Rassemblement National, j’ai l’étiquette des Républicains ».

Des candidats fâchés avec la science

Et il n’est pas le seul. Certains noms ont pu bénéficier de l’urgence de la dissolution pour passer le filtrage des formations politiques. Mais d’autres, encartés de longue date, sont sciemment soutenus par leur parti. « L’empreinte conspirationniste risque de progresser à l’Assemblée nationale », analyse Tristan Mendès France, maître de conférences et membre de Conspiracy Watch. Ce que confirme et regrette le sociologue Laurent Cordonier, directeur scientifique de la Fondation Descartes, car « bénéficier de la tribune de l’Assemblée nationale donne du poids et crédibilise les discours alternatifs ».

Parmi les profils ouvertement complotistes, on trouve Jonathan Rivière, investi par le RN à La Réunion. « On n’a jamais marché sur la Lune », affirme-t-il sur les réseaux sociaux, « La CIA est derrière le 11-Septembre » ou encore « les vaccins vous tueront ». D’autres candidats du RN soutiennent des thèses similaires, comme Stéphanie Alarcon, en lice en Haute-Garonne, qui affirme que « le système de santé est fait pour créer des malades ». Monique Griseti, dans les Bouches-du-Rhône fait siens les messages pour « éveiller les consciences » autour de Sound of Freedom, le film étant un cri de ralliement du mouvement QAnon. Patrick Le Fur (RN) martèle que « les ministres de Macron forment un club ultrasecret lié à des affaires de pédophilie ». Aly Diouara (LFI) clame que « le vaccin est un outil tout sauf médical ». Éric Verhaeghe, de l’Alliance centriste, a apporté son soutien aux rumeurs sur le changement de sexe de Brigitte Macron. Emmanuelle Darles, maître de conférences en informatique, investie par le RN dans la première circonscription de la Vienne, s’est surtout fait connaître pendant la crise sanitaire pour ses positions covidosceptiques. En mai 2022, elle n’a par exemple pas hésité à comparer la vaccination des enfants à « un viol ». Cette chercheuse est aussi membre du Conseil scientifique indépendant, une association créée pendant la crise sanitaire par Xavier Azalbert, le dirigeant du site complotiste France-Soir, et Réinfo Covid, de l’anesthésiste conspirationniste Louis Fouché. Candidate pour le RN également, Virginie Joron, tout juste réélue eurodéputée, s’est distinguée par ses positions hostiles à la vaccination anti-Covid. Elle a signé l’avant-propos d’un livre rédigé par la statisticienne complotiste Christine Cotton et a également invité au Parlement européen des personnalités comme l’ex-généticienne Alexandra Henrion-Caude ou l’infectiologue Christian Perronne, tous deux mis au ban de la communauté scientifique. Le Rassemblement National n’est pas le seul à adouber des candidats antivax. Debout la France n’est pas en reste avec, par exemple, Éric Mercier (6e circonscription du Maine-et-Loire), un infirmier suspendu pendant la crise sanitaire pour avoir refusé de se vacciner. Le parti de Nicolas Dupont-Aignant soutient également la candidature de Véronique Rogez (5e circonscription de l’Oise), une médecin généraliste qui a fermé son cabinet parce qu’elle refusait le vaccin anti-Covid.

Un certain nombre de candidats se distinguent aussi par leur intérêt, plus ou moins assumé, pour les médecines alternatives et les pratiques ésotériques. On peut ainsi relever les candidatures RN de Aurélie Quinquis, naturopathe et réflexologue à Marseille ou encore Cyline Humblot-Cornille, praticienne en soins énergétiques près de Dijon. Et que dire de la liste Écologie au centre, menée par Jean-Marc Governatori, conseiller municipal à Nice. Il est affirmé, dans son programme, qu’un « manque d’harmonie » cause les maladies. « La jalousie, la désespérance, la médisance et le désordre » provoqueraient des pathologies. Écologie au centre veut aussi « officialiser un comité d’experts indépendants sur les traces suspectes dans le ciel ». 

(Sources : Ouest-France,15.06.2024 & Charlie Hebdo, 20.06.2024 & L’Express, 22.06.2024)

  • Auteur : Unadfi