
Chaque année, des millions de dollars en dons de charité quittent le Canada pour soutenir des causes religieuses à l’étranger. Une enquête de La Presse révèle qu’en cinq ans, 700 millions de fonds publics ont ainsi été alloués à des groupes religieux grâce aux crédits d’impôt.
L’analyse de 65 000 dons versés par les Canadiens à l’étranger entre 2019 et 2023 montre que 1,9 milliard de dollars ont été transférés sous la bannière de « l’avancement de la religion », une des quatre missions reconnues par l’Agence du revenu du Canada (ARC). Cette manne fiscale a particulièrement bénéficié à des groupes évangéliques conservateurs américains, certains affichant ouvertement leur soutien à Donald Trump et leur opposition aux droits LGBTQ+ ou à l’avortement.
Des fonds ont également atterri en Israël, parfois pour soutenir la colonisation des territoires occupés ou même financer l’armée israélienne. Ces usages ont conduit à la révocation du statut caritatif de certains organismes canadiens.
Ces pratiques soulèvent des questions fondamentales sur la légitimité de subventionner, par l’impôt, des causes religieuses étrangères. Le comité permanent des finances à Ottawa a recommandé, en décembre 2024, de revoir les avantages fiscaux liés aux dons religieux, y compris ceux faits au Canada. Une mesure qui remettrait en question un privilège datant du XVIIe siècle.
À l’international, le Canada fait figure d’exception. Plusieurs pays européens, comme la Belgique ou la Finlande, n’offrent pas d’exemptions fiscales pour les dons religieux. En Europe, les transferts religieux représentent 1 % des dons transfrontaliers, contre 12 % au Canada. Cette proportion grimpe à 2,6 milliards de dollars si l’on inclut les organismes ayant une vocation religieuse sans s’afficher comme tels, comme Compassion Canada, qui œuvre au nom de la foi chrétienne mais est classée dans la catégorie « lutte contre la pauvreté ».
(Source : La Presse, 20.05.2025)