Les thérapies de conversion en hausse

Sorti sur les écrans le 27 mars 2019, Boy Erased, film américain de Joel Edgerton, tiré du livre de Garrard Conley, aborde le sujet des thérapies de conversion. Il est basé sur l’histoire vraie d’un fils de pasteur qui a été forcé de suivre un « programme de masculinisation » pour « soigner son homosexualité ». Détenu dans un centre de thérapie chrétienne, il y vivra un véritable enfer.

Aux États-Unis, près de 700 000 jeunes homosexuels seraient passés par ce type de centre. On pourrait penser la France épargnée par ce phénomène, mais ce n’est pas le cas. Selon Laurence Vanceunebrock-Mialon1 deux tendances se dégagent : d’un côté les stages de réorientation sexuelle conduits par des cercles religieux, de l’autre des thérapies dispensées par des médecins qui traitent homosexualité avec des anxiolytiques.

Le Refuge, une association d’aide aux homosexuels, déclare que nombre d’appels reçus concernent ces pratiques. Une jeune femme suivie par l’association raconte que ses parents catholiques pratiquants n’ont pas trouvé d’autre solution, après son coming out, que de l’emmener voir un prêtre exorciste. Vivant l’homosexualité de leur enfant comme une pathologie dramatique, certains parents se tournent vers « la guérison ».

En France, ces thérapies sont pratiquées dans des centres chrétiens, mais aussi par des prédicateurs musulmans. Chez le Témoins de Jéhovah, l’homosexualité est sanctionnée. Le Refuge a suivi le cas d’un jeune homme dont l’homosexualité avait été révélée en assemblée pour le remettre dans le droit chemin. Et pour éviter qu’il fasse de mauvaises rencontres son téléphone et son ordinateur lui avaient été confisqués.

Selon Anthony Favier, président de l’association catholique David et Jonathan, cette tendance en hausse serait la conséquence de la croissance du mouvement évangélique. Très conservateur, il condamne l’homosexualité sur la base d’une lecture littérale de la Bible. Antony Favier s’inquiète du développement de mouvements comme Torrents de vie ou Courage qui proposent des stages de réorientation sexuelle.

Les thérapies de conversion passent majoritairement par des exorcismes. A l’instar de l’Assemblée Chrétienne du Christ Ressuscité, certains prédicateurs protestants n’hésitent pas à pratiquer « la délivrance » en public, notamment celle de l’homosexualité. Malgré la violence de ces pratiques, les pasteurs ne sont pas inquiétés par la justice, car la victime, convaincue par son entourage qu’elle est malade, consent aux « soins ». En ce qui concerne l’Islam, l’homosexualité reste un sujet tabou dans beaucoup de familles. Des cas de thérapies de conversion existent notamment par exorcisme.

Selon Joël Deumier, président de SOS Homophobie, la France dispose d’un arsenal juridique suffisant, mais la justice se heurte à la difficulté de prouver l’emprise de la victime.

En France, il existe un vide juridique sur ces thérapies. Bien qu’elle ait conscience que ce sujet est très délicat à aborder, car il touche au domaine religieux, Laurence Vanceunebrock-Mialon travaille sur une proposition de loi.
Si la France est à la traîne, d’autres pays ont déjà adopté un texte demandant aux États membres de l’Union européenne d’interdire ces thérapies. C’est chose faite à Malte et dans certaines régions autonomes d’Espagne, tandis que des pays comme l’Allemagne, la Pologne ou le Royaume-Uni ont entamé des travaux sur ce sujet.

(Source : France 24, 26.03.2019)

1. Député La République en Marche.