Fin janvier, les élections législatives péruviennes ont propulsé le Front populaire agricole du Pérou (Frepap) à la deuxième place au Parlement avec 16 sièges sur 130. Le Frepap est le bras armé d’une secte religieuse ultra-conservatrice, l’Association évangélique de la mission israélite du nouveau pacte universel (Aeminpu). Ce résultat inattendu pourrait avoir un impact sur la vie politique péruvienne dans un parlement fragmenté par les dernières élections.
L’arrivée du Frepap au parlement et leurs opinions fondamentalistes et ultra-conservatrice suscite des inquiétudes. Avant cette élection le parti était considéré comme un groupe de fanatiques religieux marginaux. Ses élus ont déclaré ne pas vouloir faire d’alliances formelles avec d’autres partis mais ils considèrent que si une proposition correspond à leur projet ils pourraient voter pour. L’un d’eux, Wilmer Cayllahua, a déclaré que son parti allait se positionner pour une moralisation de la vie politique, et visait des postes d’influence dans les domaines de l’agriculture et de l’éducation pour pouvoir s’opposer notamment à l’actuel programme d’éducation sexuelle. Pour Adriana Urrutia, directrice de l’école de sciences politiques de l’Université Antonio Ruiz de Montoya de Lima, le vote pour le Frepap exprime un mécontentement populaire qui sanctionne les partis établis associés à la corruption et délaissant les zones rurales. Le parti a utilisé les stratégies de prosélytisme de l’Aeminpu pour mener sa campagne.
Le Frepap, bras politique de l’Aeminpu, a été fondé en 1989 par Ezequiel. Le fondateur se présentera à trois reprises aux élections présidentielles sans jamais dépasser la barre des 1%. Le but de ce parti politique était de donner une visibilité et de pouvoir légiférer en faveur des projets du mouvement sectaire lié au parti. Selon Carlos Ernesto Ráez, un anthropologue péruvien qui a étudié le parti politique et le groupe religieux, le but ultime du mouvement est d’établir une théocratie.
L’Aeminpu a été elle aussi fondée, en 1968, par Ataucusi qui s’autoproclamait réincarnation du prophète Ezechiel et prétendait être le « Christ de l’Occident ». La doctrine du groupe mélange l’ancien Testament avec des éléments de croyances incas. Pour le mouvement le Pérou est la terre promise, c’est l’Israël d’Occident et la population péruvienne est le peuple élu. Les membres du groupe portent de longues tuniques. Les hommes ont de longues barbes et les femmes ont la tête couverte. A la mort du leader en 2000, les fidèles ont placé son corps dans un cercueil en verre et ont espéré vainement sa résurrection. Depuis sa disparition, son fils a repris l’entreprise fondée par son père, aussi bien sur le plan de l’activité religieuse que politique.
(Sources : The Guardian, 30.01.2020 & BBC, 31.1.2020 & Libération, 01.02.2020)
