Que sont devenues les Sœurs contemplatives de Saint-Jean ?

Cette communauté catholique inspirée par Marie-Dominique Philippe, le fondateur, s’est refondée en Espagne sous le nom de Maria Stella Matutina. Selon une enquête menée par Mikael Corre, du journal La Croix, de nombreuses dérives demeureraient et aucune remise en question ne serait à l’ordre du jour.

La communauté d’origine des Sœurs contemplatives de Saint-Jean a été fondée en 1982 par Alix Parmentier la secrétaire particulière de Marie-Dominique Philippe avec lequel elle aurait entretenu des relations intimes dès les années 1950. Décédée en 2016, Alix Parmentier a tout au long de sa vie voué un véritable culte à son mentor, pourtant accusé d’agressions sexuelles par 25 femmes. Dès les années 1970, elle-même aurait initié sexuellement de jeunes aspirants à la vie religieuse. En 2010, l’un d’eux s’est retourné contre elle en dénonçant auprès du Vatican les agressions qu’il avait subies.

Mais en 2009 quand le cardinal Barbarin, archevêque de Lyon, lance une réforme de la communauté après les résultats d’une enquête menée par deux mères abbesses, il ignore les violences sexuelles et la grande détresse psychologique vécue par certaines sœurs de la communauté. Il s’inquiète des mensonges et de l’emprise exercée par les supérieures de la congrégation, en particulier Marthe Hubac qui remplace Alix Parmentier, vieillissante. Quand il nomme une nouvelle prieure générale à la tête de la communauté, des membres de la maison mère située à Saint Jodard (Loire) entrent en rébellion et la plupart s’enfuient. Après une tentative d’implantation avortée au Mexique, grâce à l’intervention du Saint-Siège, la communauté se refonde à Cordoue en Espagne en 2012 sous le nom de « Sœurs de Saint-Jean et Saint-Dominique ».

Malgré les diverses sanctions du Vatican, dont un décret de dissolution en 2013, les sœurs ne désarment pas et fondent une nouvelle communauté à Bergera en Espagne. Les Sœurs de Maria Stella Matutina sont nées et finalement acceptées par le Vatican en 2014, à la condition qu’Alix Parmentier, Marthe Hubac et sa sœur Isabelle (autre figure de la communauté) soient exclues de toute vie religieuse.

Sept ans plus tard, en 2021, si Alix Parmentier est depuis décédée, les deux autres seraient toujours là et exerceraient un contrôle total sur le groupe. Marthe Hubac seraient l’enseignante quasi exclusive de la congrégation selon Nadège Cambon, une ancienne sœur, censée être la prieure officielle du couvent.

Selon des témoignages auxquels La Croix a eu accès, les dysfonctionnements constatés en 2009 seraient les mêmes. Les anciennes sœurs décrivent : des journées au rythme effréné, « des repas pris seule en cellule », l’incitation à la mendicité, un fonctionnement pyramidal et une forte emprise des supérieures. Elles font aussi état de nombreuses dépressions et de tentatives de suicide cachées aux familles. Selon une ancienne religieuse, « au moins 50 religieuses étaient en détresse psychologique dans les années 2010 ». La communauté compte 300 membres. Une autre explique « qu’aucune évaluation psychologique n’était requise pour entrer dans la communauté ».

Le journal La Croix qui a proposé à la communauté de s’exprimer s’est vu répondre dans un courrier envoyé par la maîtresse des novices « qu’il vaut mieux rester dans le silence ». 

(Sources : La Croix, 10 & 11 juillet 2023)

  • Auteur : Unadfi