Quand les influenceurs versent dans le mysticisme

Connue pour ses sketchs humoristiques, la YouTubeuse Andy raconte (Nadège Dabrowski de son vrai nom) a publié une vidéo où elle dévoile sa récente conversion spirituelle. Un coming-out évangélique qui est loin de faire l’unanimité.

Nadège Dabrowski, plus connue sous le nom d’ « Andy Raconte » a été actrice, mannequin, et a occupé les premières marches du podium dans la catégorie « femme qui ose faire de l’humour sur Internet à une époque où seuls les hommes avaient le droit de le faire ». Sa dernière vidéo marque un tournant. Sous le titre « Séparation, maison hantée, occultisme… et Dieu », Andy se livre, face caméra, sans tabou à son million d’abonnés. De son enfance dans un foyer athée, à sa première « manifestation » avec « l’autre monde », en passant par son divorce et sa récente conversion spirituelle. Elle dit avoir trouvé la paix intérieure en se rendant dans une église évangélique. De quoi faire tiquer un bon nombre d’internautes qui voit, dans son parcours, la victime idéale des discours trompeurs de dérives sectaires. Il faut dire que la jeune femme coche toutes les cases. Attirée depuis toujours par « le dark », elle a souvent fait appel à « un guérisseur spirituel », suite à un mariage raté ou des maux de ventre notamment. Puis elle est tombé sur le TikTok d’un certain David-Antoine, un influenceur évangélique. Elle dit alors « avoir eu l’impression d’être rentrée dans un monde qu’on nous a caché ! On est vraiment endormis, on croit que ça n’existe pas ! Et c’est pour ça qu’on en fait des films, pour qu’on nous fasse croire que ça n’existe pas ».

Ces propos ont agacé sa communauté mais n’étonne pas l’Unadfi. « Elle a le parcours classique d’une victime : on passe du malheur à la spiritualité, à Jésus qui vous aime, Jésus qui vous guérit. » La communauté rejointe par Andy est d’ailleurs, sans surprise, dans le viseur de l’association : « Le but premier des évangéliques, c’est d’évangéliser. Ils sont convaincus qu’il faut partager la bonne nouvelle de l’Évangile. Le mouvement a évolué depuis quelques années et se rapproche désormais de ce qui se fait aux États-Unis, on parle de réveil, du baptême qui nous fait renaître ». 

Pour l’Unadfi, il existe deux risques particulièrement importants au mouvement évangélique : la théologie de la prospérité et la guérison. « La théologie de la prospérité consiste à dire que plus l’on donne, plus l’on reçoit en retour. Il y a un appel aux dons permanent parmi les fidèles où on va leur promettre en retour la bénédiction. L’autre aspect inquiétant concerne la guérison. On promet aux fidèles d’aller mieux grâce à l’amour de Dieu ou par des gestes symboliques, comme le pasteur qui vient apposer ses mains sur un membre. Alors certes, être dans une communauté et entouré de gens chaleureux peut aider à se sentir bien mais ça ne soigne pas tout, il faut être vigilant et s’assurer que les gens ne se détournent pas de potentiels traitements médicaux ».

Pour l’heure, Andy n’a pas appelé directement ses abonnés à faire partie « de l’armée de Jésus » comme elle s’en félicite sur TikTok. Mais elle en fait la publicité. Et elle n’est pas la seule sur les réseaux sociaux. 

(Source : Charlie Hebdo : 06.06.2024)

  • Auteur : Unadfi