Des écoles Steiner auraient-elles dissimulé des abus sexuels ?

Des abus sexuels commis au sein d’écoles Steiner auraient été dissimulés par des chefs d’établissement. Des faits similaires se seraient déroulés en France comme à l’étranger. Marion Duquesne relate le témoignage des victimes dans un article publié sur le site Journaleuse.

En avril 2019, la Miviludes a reçu le signalement d’Angélique, maman d’un enfant de trois ans scolarisé depuis novembre 2018 dans une école Steiner du Sud de la France. Peu de temps après la rentrée l’enfant commence à avoir des terreurs nocturnes et semble cacher un secret. Elle apprend finalement qu’il est maltraité par un élève âgé de six ans dont le père est accusé de pédophilie.

Des signalements similaires, la Miviludes en a enregistré onze en 2018 et quinze depuis le début de l’année 2019. « Des chiffres importants au regard du nombre d’établissements en France, soit 24 jardins d’enfants ou écoles Steiner. »

En 2003, les parents de deux jumeaux âgés de trois ans portent plainte contre X pour agressions sexuelles sur mineurs. Leurs enfants, scolarisés depuis octobre 2002 à l’école Steiner de Verrières-le-Buisson(77), ont raconté, pour l’un des deux, avoir mal aux fesses, pour l’autre d’avoir dû toucher le sexe d’un homme. Les parents prennent immédiatement rendez-vous avec la jardinière qui s’occupe d’eux dans l’établissement. Elle nie les faits et leur recommande de ne pas ébruiter l’affaire. Contrariés les parents envoient un courrier à la Fédération des écoles Steiner-Waldorf qui n’a jamais répondu. Pire, l’école envoie un courrier aux autres parents pour les inviter à renouveler leur confiance à l’école et à discréditer les parents des jumeaux. Refusant de le signer, un autre couple de parents se verra obligé de désinscrire son fils devenu soudain indésirable. Laure Lusseyran, l’actuelle responsable de l’école, se défend en rappelant que l’établissement avait « mis en oeuvre toutes les procédures d’usage » et réfute les accusations des parents. L’auteur de faits n’ayant pu être identifié, la plainte a abouti à un non-lieu en 2005. Néanmoins, les deux personnes soupçonnées et interrogées lors de l’enquête menée en 2003 ne font plus partie du personnel de l’école.

Si cette histoire est ancienne, de récents événements ont à nouveau plongé l’école dans la tourmente. Trois familles ont retiré leurs enfants en 2018, leurs enfants s’étant plaints d’avoir subi des violences sexuelles de la part d’un autre élève. Pour l’école, « les faits n’ont jamais été avérés » et l’équipe pédagogique va même jusqu’à qualifier l’enfant mis en cause de « lumineux » ou de « bel enfant ». Mais lorsque les parents d’une fillette violentée ont voulu déposer plainte contre l’école, un policier a refusé, affirmant « s’attaquer à l’école, c’est comme de s’attaquer à l’Etat ».

Une petite fille de trois ans, scolarisée en Belgique, a connu les mêmes déboires. Inscrite en 2015 dans une école Steiner, la fillette va y vivre un véritable cauchemar seulement quelques mois après y être entrée. Un petit garçon la violente et malgré les avertissements de sa mère auprès de l’équipe pédagogique, il finira par l’enfermer dans les toilettes de l’école pour lui toucher le sexe. Traumatisée, la petite fille fait des cauchemars et pleure pour ne plus aller à l’école. Mais les responsables de l’école nient les faits traitant la petite fille de menteuse. Ses parents, s’entendront dire à propos des problèmes entre les deux enfants, « il faut laisser les âmes s’affronter ».

D’autres abus ont été relevés aux Etats-Unis. En 2001, la fille de Margaret Sachs, aujourd’hui modératrice d’un site d’aide aux victimes1, a été agressée par un professeur lors d’un voyage scolaire. Bien qu’elle n’ait pas été la seule dans ce cas, les responsables de l’école ont nié et intimidé les jeunes filles pour qu’elles se rétractent. Après de nombreuses réunions, Margaret Sachs obtiendra que l’enseignant soit remercié, mais sa fille sera renvoyée de l’école. Une plainte fut déposée, mais la jeune fille « ne se sentait pas la force de témoigner en justice ».

En 2014, une enquête de sept mois menée par un organisme d’investigation indépendant, à la demande de l’école Steiner de Green Meadow (Etat de New York), a révélé que trois enseignants avaient commis des infractions à caractère sexuel. L’enquête a conclu que « le manque de réaction de l’école avait permis un comportement prédateur » d’au moins l’un des agresseurs. 95 personnes ont été entendues, mais aucune arrestation n’a eu lieu, car les faits étaient prescrits. Les victimes, quant à elles, n’ont pas osé dénoncer les faits par crainte de ne pas être crues. Depuis lors, l’une des victimes, Kate Christensen, a écrit un livre intitulé Blue Plate dans lequel elle explique que les relations entre élèves et professeurs étaient souvent ambiguës. Selon elle, « rien ne montrait qu’ils avaient l’impression de faire quelque chose de mal ». Ce que confirme Hugo Etienne, un ancien élève de l’école Steiner Perceval située à Chatou (78) selon lequel « des professeurs fréquentent des élèves en dehors des heures de classe ».
Bien que souvent présentées comme une nouvelle alternative à l’Education nationale, les écoles Steiner sont anciennes. Elles fêtent cette année leurs 100 ans. Elles basent leur enseignement sur les travaux de Rudolf Steiner, le fondateur de l’anthroposophie, un mouvement présenté par la Miviludes comme « imprégné d’ésotérisme et de christianisme hétérodoxe ».

(Source : Journaleuse, 23.09.2019)

1. http://www.waldorfcritics.org/survivors.html

En Grande-Bretagne des accusations du même type ont amené à la fermeture d’une école et au contrôle d’un grand nombre d’autres par les inspecteurs de l’éducation (OFSTED).

Pour plus d’informations sur ce sujet :

Contrôle de grande ampleur dans les écoles Steiner : https://www.unadfi.org/groupes-et-mouvances/controle-de-grande-ampleur-dans-les-ecoles-steiner

Une école contrainte à la fermeture temporaire : https://www.unadfi.org/groupes-et-mouvances/une-ecole-contrainte-a-la-fermeture-temporaire

  • Auteur : UNADFI