Deux ans de prison requis contre le leader du groupe

Le parquet de Caen a requis deux ans de prison « éventuellement avec sursis » assortis d’une mise à l’épreuve et 15 000 euros d’amende à l’encontre d’Alberto Maalouf, le dirigeant de l’association chrétienne Notre Dame Mère de la lumière. Il comparaissait devant le tribunal correctionnel pour « abus de faiblesse et sujétion psychologique envers 19 personnes ».


Fondé en 2008, le groupe d’inspiration charismatique, d’abord en lien avec l’aumônerie de l’université de Caen avant d’en être exclu, organisait des veillées de prières et des maraudes au profit des sans-abris.

Charismatique, Alberto Maalouf, médecin au CHU de Caen, fédérait près de 300 personnes autour de lui. Un groupe de fidèles décida de créer une « communauté nouvelle », dont les membres prononcèrent des voeux et s’installèrent dans deux maisons, une pour les femmes, l’autre pour les hommes, dans le but de vivre de façon ascétique à l’image des premiers apôtres.

Mais dès 2011 la cellule chargée des dérives sectaires au sein de l’épiscopat de Caen est alertée par d’anciens membres. L’un d’eux a fondé aux côtés d’un psychologue, Benoît Lechevalier, l’association Toscin dont l’objet est d’aider les « autorités publiques et ecclésiales sur la question des dérives sectaires ». En 2015, l’ADFI Normandie reçoit de nouvelles plaintes et, accompagnée de Tocsin, alerte la Miviludes qui saisira le procureur de Caen. En 2016, au terme d’une enquête canonique, l’évêque de Bayeux, Mgr Jean-Claude Boulanger, retire la lettre de mission qu’il avait confiée au groupe en 2012. Citée durant l’audience, sa déposition à la police n’est pas tendre envers Alberto Maalouf qu’il qualifie de « pervers narcissique » ayant une « emprise sur les membres de sa communauté ».

Sur les 19 personnes considérées comme victimes, neuf ont récusé les expertises psychiatriques qui pointaient des « personnalités facilement influençables », et sont restées fidèles à Alberto Maalouf, estimant qu’il est victime d’un complot d’un ancien membre blessé dans son amour propre. Pour elles leur implication dans la communauté, allant jusqu’au voeu de chasteté, découle d’un « choix personnel » et non de l’influence de leur leader.

Mais d’autres dénoncent un culte de la personnalité de celui que seul son « noyau consacré » pouvait approcher et des pressions constantes au sein du groupe. Pour intensifier son emprise, il aurait imposé des « prières des frères » au cours desquelles les adeptes subissaient des humiliations publiques. Il aurait également consulté les dossiers médicaux de certains de ses fidèles passés par le CHU de Caen, afin d’avoir un moyen de pression supplémentaire sur eux. Culpabilisation, « obsession de pureté », qui a poussé des adeptes à rompre tout lien avec leur famille jugée impure, sont fréquentes au sein de la communauté. Selon une ex-adepte « si on émettait un doute ou une contradiction, on nous répondait que c’était une manifestation du diable ». D’autres se sont plaints d’avoir subi des intimidations à leur sortie du groupe.

Me Bosselut, l’avocat de deux victimes et de l’Unadfi, partie civile, estime que « sous des dehors fréquentables, on trouve tous les signes de l’emprise sectaire avec perte d’identité progressive.

Si Alberto Maalouf, placé sous contrôle judiciaire depuis juin 2018, n’a plus le droit d’avoir de contacts avec sa communauté, celle-ci poursuit ses activités.

Le délibéré sera rendu le 11 juillet 2019.

(Sources : Actu.fr, 21.05.2019, Le Parisien 21.05.2019, Ouest France 22.05.2019 La Croix, 24.05.2019 & Tendance Ouest 27.05.2019)