Une ancienne adepte témoigne

Ex-membre de l’organisation Kaya Team Universe, une trentenaire a accepté de se confier au journal Le Poing. Elle raconte son cheminement, de la séduction à la manipulation jusqu’à la perte de confiance en soi, au sein de ce qu’elle perçoit aujourd’hui comme une secte.

En 2018, à 28 ans, Léa (nom d’emprunt), en proie à des questionnements et à de l’anxiété après un échec professionnel, rencontre un homme impliqué dans ce mouvement, initialement appelé le Sentier du Graal. Son immersion commence par la lecture des ouvrages de Pierre Lassalle, fondateur du mouvement, et se poursuit par des rencontres avec d’autres membres. Elle participe à son premier stage en juillet 2018, débutant ainsi ce qu’elle appelle la « trilogie renaissance ».

Les stages, onéreux et payables en espèce uniquement, débutent de manière inoffensive, avec des pratiques de méditation et de travail émotionnel, mais évoluent vers des pratiques plus intrusives et des discours manipulatoires. Léa décrit un « lavage de cerveau » au travers d’études méditatives prolongées et d’une rhétorique manichéenne. Elle observe également un recrutement actif de jeunes adultes, avec un accent mis sur le « rayonnement du mouvement » et une pression pour amener de nouveaux adeptes.

Au fil du temps, Léa constate une hiérarchie implicite et des tensions au sein du groupe, exacerbées par des pratiques de confession forcée et de règlements de compte humiliants. Les membres sont contraints à une conformité idéologique rigide, sous peine d’être stigmatisés.

L’organisation va traverser des turbulences lorsque Pierre Lassalle tombe malade. Il attribue son état aux « projections négatives » des adeptes « qui ne font pas assez d’efforts pour le rayonnement du mouvement ». La situation se durcit encore avec l’arrivée de la pandémie de Covid-19, le mouvement exploitant la crise pour propager des idées conspirationnistes et sectaires. Pour Pierre Lassalle, « les forces obscures sont à l’œuvre et les gens vaxxés (c’est le terme qu’il utilise) renient leur âme ».

Pour Léa, l’expérience vire au cauchemar. Elle tombe malade. Les propos qu’elle entend commencent à semer le doute en elle. Le point de rupture survient finalement en 2021, lorsque sa santé physique et mentale est mise en péril lors d’un stage. Elle subit des pressions, parle même de « maltraitance » et se sent fragile. Elle ressent « la toxicité du groupe », trouve « l’ambiance malsaine ». Elle entame alors un processus de désengagement progressif, aidée par des personnes extérieures qui vont lui montrer des documentaires sur les dérives sectaires. Son départ du mouvement est difficile, marqué par la culpabilité et la perte de confiance en elle. Aujourd’hui, Léa reconstruit sa vie mais reste marquée par son expérience au sein de Kaya Team Universe. Elle met en garde contre « les dangers de l’endoctrinement qui font perdre tout discernement ».

Contactés par les journalistes du Poing, les fondateurs du mouvement, Pierre et Céline Lassalle, n’ont pas souhaité commenter ces allégations. 

(Source : Le Poing, 03.03.2024)

  • Auteur : Unadfi