Un suicide transformé en mort mystique ?

La Communauté des Béatitudes a transformé en mythe le décès de Cathy, la sœur de Sylvaine, afin d’en faire une sainte et d’attirer des fidèles. Sylvaine se bat aujourd’hui pour faire reconnaitre que cette mort était en fait un suicide.

Cathy avait 21 ans quand elle a été retrouvée morte dans son lit. Elle était entrée dans le groupe quatre ans auparavant, dans les années 1970, à une époque où celui-ci était en pleine essor et bénéficiait d’une certaine popularité. Sylvaine et sa famille adhèrent au groupe et vont rendre régulièrement visite à Cathy. Mais cette dernière vit un « calvaire » au sein du groupe subissant des abus et des séances d’exorcisme. Elle tente deux fois de s’enfuir mais « est ramenée manu militari dans son couvent. »  et de se suicider selon ses sœurs. En 1979, alors qu’elle est dans un monastère du groupe à Pont-Saint-Esprit, elle ne descend pas manger avec les autres c’est alors qu’un adepte la découvre allongée dans son lit un voile de religieuse autour du visage. Pour les fondateurs et dirigeants du groupe il s’agit d’une crise cardiaque.

Après le décès de sa sœur, Sylvaine vivra plusieurs années dans différents lieux appartenant au groupe avant de rompre totalement avec la communauté lorsqu’elle a 17 ans. Pendant trente ans, elle n’aura aucun lien avec les Béatitudes, avant d’effectuer des recherches en 2019 et de découvrir l’ensemble des affaires qui agitent le groupe à savoir des faits de pédophilie, d’abus sexuels, d’abus spirituels… Elle découvre alors que la mort de sa sœur a été transformée en mythe par le groupe. Dans un documentaire elle entend un ancien bras droit du leader parler de sa sœur comme une ancienne prostituée (ndlr : ce qui est entièrement faux) qu’il fallait délivrer par des prières et des exorcismes. Le groupe a toujours cru que Cathy était « restée des mois allongée dans son lit et morte dans son lit de sa belle mort dans les mains de Dieu »,  Ephraïm, écrivant dans ses livres que « Sainte Thérèse de Lisieux est venue la chercher ». Depuis, Cathy est placée au rang de sainte par la communauté et chaque année des messes blanches ont lieu aux dates de son anniversaire et de sa mort.

En réalité la mort de Cathy a été tout autre.  Selon des auditions de gendarmerie datant de 2019 consultées par Charlie Hebdo, une fidèle a découvert Cathy pendue à une tringle à rideaux. Son hurlement a attiré des dirigeants du groupe qui « ont dépendu Cathy, l’ont mise dans le lit et ont caché les marques de strangulation avec un voile de religieuse » explique Sylvaine.

En 2022, avec le soutien du Centre contre les Manipulation Mentales (CCMM), Sylvaine a réussi à faire exhumer le corps de sa sœur et détruire la pierre tombale qui était dans un monastère du mouvement. Elle souhaite aller encore plus loin dans son combat et faire reconnaitre le calvaire et la pendaison de Cathy par l’Eglise, mais aussi que son image ne soit plus utilisée par les Béatitudes à des fins de prosélytisme. 

(Source : Charlie Hebdo, 05.10.2023)

  • Auteur : Unadfi