« Les abus que j’ai subis au sein de la secte d’Osho Rajneesh me hante depuis des décennies »… Auteure du livre In the Shadows of Enlightenment, Sarito Caroll se dit aujourd’hui prête à s’exprimer.
En 1978, alors qu’elle avait neuf ans, elle est partie en Inde avec sa mère, devenue disciple de Bhagwan Shree Rajneesh qui se fera ensuite appeler Osho. Comme d’autres de sa génération, elle a été séduite par ses promesses. Il proposait une nouvelle voie vers l’autolibération par le biais de méditations cathartiques et de groupes thérapeutiques, de vie communautaire et d’amour libre. En Occident, Osho était surnommé le « gourou du sexe ».
Peu de temps après leur arrivée à l’ashram de Rajneesh, Sarito a été initiée à la communauté. Elle trouvait l’aventure exaltante, l’école n’était plus qu’un lointain souvenir, les jardins luxuriants de l’ashram un immense terrain de jeu où elle errait librement, loin des structures et des règles. Là-bas, les enfants n’appartiennent pas à leurs parents biologiques mais à la collectivité.
« Coucher à plusieurs, c’était la norme »
Au fil du temps, la façade de l’amour et de la célébration a commencé à se fissurer, révélant des courants sous-jacents plus sombres et le comportement inapproprié de certains hommes. Sarito parle de « baisers avec la langue, de masturbations… » et se souvient qu’au fond d’elle-même, elle savait « rester vigilante ». Les choses se sont accentuées quand la communauté a déménagé aux États-Unis en 1981. Dans ce ranch de l’Oregon, elle pensait pouvoir vivre une histoire d’amour avec un homme. Elle avait 12 ans, il en avait 29. Il l’attirait dans son lit le soir mais l’ignorait le jour, préférant courtiser des femmes de son âge. Elle souffrait en silence. Puis d’autres hommes sont venus dans le lit. « J’ai cédé, car coucher à plusieurs, c’était la norme qui m’avait été inculquée ». Mais elle a fini par faire des crises d’angoisse. Sans jamais parler de sa douleur et de sa confusion « parce qu’être négatif, c’était considéré comme un défaut ».
Lorsque la communauté s’est effondrée en 1985, qu’elle est retournée dans le vrai monde sans y être préparée, elle était désorientée, sans argent et ne savait plus qui elle était. Le traumatisme de son éducation la hantait sans qu’elle puisse encore le nommer. Il lui faudra des années pour s’avouer que « sous couvert de liberté spirituelle, Osho a semé le chaos ». Des années pour reconstruire une vie.
Un livre et un film
En 2018, Netflix a diffusé Wild Wild Country, une série documentaire sur la communauté de Rajneeshpuram. La regarder a suscité chagrin et colère chez Saruto, ramenant Rajneesh sur le devant de la scène. Mais en se concentrant sur les scandales politiques et criminels dans l’Oregon alors qu’à aucun moment les enfants n’ont été évoqués. Elle a alors pris son courage et parlé, dans un groupe Facebook, des abus dont elle a été victime. Puis elle a pris contact avec d’autres victimes. Chaque nouvelle révélation était déchirante. Une de ses camarades de Rajneeshpuram a dit qu’elle avait couché avec 70 hommes, une autre avec 150. Et ce, avant qu’elles aient atteint l’âge de 16 ans. Les enfants des communautés Rajneesh en Europe ont également pris la parole. C’est ainsi qu’elle a rencontré Maroesja Perizonius, réalisatrice du documentaire Children of the Cult. Elles ont noué des liens et partagé la même détermination à dénoncer les abus systémiques qui avaient été trop longtemps réprimés. Sarito a commencé à écrire ses mémoires, Maroesja a entrepris de réaliser un film qui dévoile les abus omniprésents perpétrés au nom de l’amour et de la lumière. Toutes les deux se disent aujourd’hui fières que leurs histoires soient enfin entendues.
(Source : The Guardian, 12.10.2024)
A lire sur le site de l’Unadfi : Retour aux sources et à la doctrine de Bhagwan Rajneesh Osho (première partie) : https://www.unadfi.org/wp-content/uploads/2015/03/Bhagwan-Rajneesh-Osho-1ere-partie.pdf
Et (deuxième partie) : https://www.unadfi.org/wp-content/uploads/2014/08/Bhagwan_Rajneesh_Osho_2eme_partie_.pdf