Des patients « traumatisés » après un séjour en centre de désintoxication 

Un centre de désintoxication non réglementé, lié à la Scientologie, a soumis des personnes mentalement vulnérables à des exercices psychologiques intensifs, qui les auraient laissées « traumatisées ».

D’anciens patients et membres du personnel de Narconon UK, un complexe isolé du Sussex, affirment que des personnes, en quête d’aide contre l’addiction, ont été amenées à effectuer des exercices mentaux similaires à ceux utilisés dans le controversé « processus d’audition » de la Scientologie. Avant leur arrivée, elles pensaient que Narconon offrait une approche holistique de la réhabilitation et étaient attirées par la promesse de devenir « définitivement libres de la drogue ». Mais, durant trois mois, en état de manque, elles auraient participé, de manière prolongée, à des exercices répétitifs, « jusqu’à perdre conscience » ou « devenir paranoïaques », soulignent des témoignages concordants. Des participants auraient également eu des pensées suicidaires à la suite d’exercices impliquant des commandes répétitives telles que « lève-toi, assieds-toi », jusqu’à cinq heures par jour, pendant plusieurs semaines.

Des failles dans la réglementation

Ces allégations soulèvent des questions sur la manière dont un centre de désintoxication lié à l’un des groupes sectaires les plus controversés au monde, accusé de pratiques abusives, peut opérer sans réglementation au Royaume-Uni. Ouvert en 2015, près de la ville de Heathfield, le centre Narconon UK n’a été inspecté qu’une seule fois, en 2016, et il n’a jamais été évalué pour garantir l’efficacité ou la sécurité de son programme. « Il fonctionne sans surveillance en raison d’une faille réglementaire », révèle l’enquête de l’Observer, « contrairement aux autres programmes de lutte contre l’addiction ». Pourquoi ? Parce que la Care Quality Commission (CQC), qui supervise les services de lutte contre la toxicomanie, rappelle que « le programme de Narconon n’entre pas dans son champ de compétence, puisqu’il s’agit d’une approche alternative ». Elle a par ailleurs déclaré qu’elle pensait que « ce centre était en sommeil depuis 2019 ». Des documents attestent que 14 plaintes ont été reçues mais qu’il n’y a pas eu d’enquête officielle.

Le Dr David Bremner, directeur médical de l’association caritative Turning Point, insiste sur « la nécessité d’une meilleure réglementation ». Le ministère de la Santé a, pour sa part, refusé de commenter.

L’enquête de l’Observer montre que Narconon est plus étroitement lié à la Scientologie qu’il ne le prétend. Ses opérations seraient soutenues financièrement par l’Association internationale des scientologues et des membres éminents du personnel seraient membres du groupe.

Pour la professeure Sally Marlow, de l’Institut de psychiatrie, de psychologie et de neurosciences du King’s College de Londres, « les routines d’entraînement prônées par Narconon n’ont rien de thérapeutiques. Et c’est extrêmement préoccupant ». Sheila Maclean, directrice du centre, s’en défend. Elle soutient que « que les participants sont évalués par un médecin avant le programme, qui comprend également de longues sessions de sauna et la prise de vitamines ». Elle trouve « les critiques profondément regrettables » et affirme « que les méthodes utilisées sont sûres et efficaces ». 

(Source : The Guardian, 03.02.2024)

  • Auteur : Unadfi