CNRS : un sigle prestigieux, des discours douteux 

Des chercheurs du CNRS affichent publiquement des positions allant à l’encontre du consensus scientifique (thérapies de guérison alternative, biodynamie…), parfois clairement complotistes. D’autres soutiennent des croyances ésotériques. Malgré plusieurs alertes internes, le plus grand organisme de recherche français reste silencieux. C’est ce que révèle une enquête de Marianne.

Parmi les figures mises en cause, Jean-Marc Sabatier, directeur de recherche en biologie. Il multiplie, depuis plusieurs années, les interventions médiatiques controversées. Sur des plateformes comme France-Soir ou la chaîne de Karl Zéro, il avance des hypothèses conspirationnistes autour des vaccins, allant jusqu’à affirmer que la campagne de rappel de vaccination contre le covid « dissimule en fait un projet de dépopulation ». Dans une lettre ouverte, des chercheurs s’insurgent affirmant qu’il a « outrepassé les règles de déontologie ».

Autre cas emblématique : Laurent Mucchielli, sociologue au CNRS. Il a, lui aussi, relayé de fausses informations sur la vaccination pendant la pandémie, via un blog hébergé par Mediapart. À l’époque, le CNRS n’avait pas jugé bon de le sanctionner soulignant que « le CNRS doit être attentif au respect de la liberté d’expression (…). Si un scientifique s’exprime en son nom propre, sans référence à son employeur, cela relève de la liberté d’expression ». En interne, certains estiment pour leur part que « l’utilisation de l’étiquette CNRS donne un vernis de légitimité à ces discours, créant confusion et désinformation ».

Et les dérives ne se limitent pas aux discours antivax. D’autres chercheurs affiliés au CNRS s’affichent comme partisans de la biodynamie (pratique basée sur les astres et des rituels ésotériques), s’appuient sur des « théories extraterrestres » ou défendent des pratiques de guérison alternatives. Ces prises de position, bien que marginales, irritent la majorité des scientifiques du CNRS qui estiment qu’elles sèment le doute sur la rigueur de l’institution : « Si le CNRS ne réagit pas, c’est qu’il accepte de fait que ces discours cohabitent avec la recherche publique », déplore un chercheur sous couvert d’anonymat.

Pour Michel Dubois, sociologue des sciences et directeur de recherche, il est urgent que le CNRS clarifie sa position : « Quand un chercheur mobilise sa casquette CNRS, il engage l’institution. Le silence peut nuire à sa crédibilité ».

On peut en effet s’interroger sur la perméabilité de certaines postures antiscientifiques ou idéologiques au sein des chercheurs CNRS, sans réaction de l’institution, alors même que ces personnalités continuent de bénéficier d’une légitimité académique. 

(Source : Marianne, 28.05.2025)

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  • Auteur : Unadfi