Depuis quelques années le yoga est devenu un véritable marché lucratif qui s’adapte à merveille avec à l’idéologie néolibérale. Il est devenu un business florissant pour de nombreuses personnes un véritable culte de la performance et du développement de son potentiel. Cependant quelques critiques s’élèvent face à cette marchandisation croissante de la pratique.
Pour Zineb Fahsi, autrice du livre Le yoga, nouvel esprit du capitalisme, le yoga « encourage l’individu à se concevoir comme une petit entreprise » en accord total avec l’idéologie néolibérale. Elle va plus loin dans le parallèle en constatant que les idées véhiculées par le yoga amènent à « la responsabilité extrême conférée à l’individu sur son bonheur et sa santé, doublée d’une exigence de perfectionnement ». L’individu devient un auto-entrepreneur de son bien-être. Le yoga se base sur des ressorts individualistes que sont le perfectionnement de soi allié au culte du corps. Cette pratique est devenue une véritable « poule aux œufs d’or du capitalisme » comme l’atteste Camille Teste, professeur de yoga et autrice du livre Politiser le bien-être. On constate en effet que de nombreux yogis surfent sur cette méthode en déclinant de multiples thématiques, des yogas différents avec toujours plus de promesses. Le business du yoga s’étend aussi aux produits dérivés et services en tout genre. Preuve de cette acclimatation parfaite dans le au néolibéralisme, Disneyland Paris a organisé un « Yoga Day » à l’occasion de la Journée Internationale du yoga, en partenariat avec une marque de vêtements.
Les yogis cherchent à différencier leur méthode dans le but d’attirer toujours plus de public. La discipline permettrait ainsi de résoudre un nombre incalculable de maux et d’améliorer le bien-être de l’individu : sculpter son corps, éliminer les rides, rester en bonne santé et vivre plus longtemps ou encore, bien entendu, accroître sa force de travail.
La pratique est aussi devenue très normée montrant des corps parfaits dans des postures difficiles à réaliser, et pouvant exclure les nombreuses différences de corps, d’âge ou d’autres particularités propres à chaque individu.
Toutes les promesses miraculeuses ne tiennent qu’à l’idée -mise en avant notamment par le New Age- que l’individu doit se transformer et travailler sur lui-même. Le yoga n’est alors qu’une méthode de plus pour développer son potentiel et fuir les difficultés et le désenchantement du monde. Zineb Fahsi résume cette idée d’individualisme inhérent au yoga en constatant que « plutôt que de changer certaines structures dans la société, on fait reposer le poids du changement sur les individus. On ne propose plus de changer le monde, mais seulement soi-même ». La santé, le bonheur, l’épanouissement ou encore l’émancipation ne reposent que sur l’individu. Les grandes entreprises semblent avoir compris cela et proposent des solutions individualisées à leurs employés plutôt que d’aborder les réelles problématiques de l’organisation du travail. L’enjeu est de laisser croire aux travailleurs que leurs problèmes sont un enjeu individuel n’ayant rien à voir avec leurs conditions de travail.
(Sources : Télérama, 10.07.2023, Radio France, 19.07.2023 & L’Echo, 27.07.2023)