
Naali, une jeune entreprise vendant du safran, a vu ses ventes exploser lors de son passage dans l’émission « Qui veut être mon associé », où étaient avancés des « bénéfices » pour la santé de cette épice, entre autres face au TDAH. Des affirmations qui inquiètent les professionnels de la santé.
La start-up Naali, qui commercialise du safran sous diverses formes (gélules, gommes, boissons…), s’est vu promettre plus de 600.000 euros d’investissement lors de son passage sur l’émission de M6. Depuis, les ventes de l’entreprise explosent : le soir de la diffusion de l’émission, elle a réalisé plus d’un million d’euros de chiffres d’affaires, ce qui représente environ 90.000 nouveaux clients. Il faut dire que les promesses de Naali sont alléchantes : la start-up prétend que le safran présenterait des bénéfices contre le stress, le manque de sommeil, les problèmes menstruels, la dépression, la ménopause, ou encore le TDAH (Trouble du déficit de l’attention).
Etienne Pot, délégué interministériel à la stratégie nationale pour les troubles du neurodéveloppement (dont fait partie le TDAH), s’inquiète des risques de dérives thérapeutiques et a saisi la Miviludes pour renforcer la vigilance sur cette épice. Il pointe notamment les méthodes commerciales de la start-up, qui diffuse sur les réseaux sociaux des vidéos de clients (parfois enfants) satisfaits : « Relayer le propos de personnes concernées par le TDAH, qui prêtent des vertus quasi miraculeuses au safran, c’est très problématique, surtout à l’heure où les experts français de ce trouble ont produit des recommandations précises sur sa prise en charge, sous l’égide de la Haute autorité de santé ».
Nadir Tayach, le co-fondateur de la start-up affirme même que le safran pourrait constituer une alternative à la Ritaline, traitement préconisé pour atténuer les symptômes du TDAH. Afin d’éviter d’être accusé de vendre un traitement illégal, il vante les bienfaits du safran en général, et non de ses produits : « Ce n’est pas un traitement et de toute façon, le TDAH n’est pas une maladie, on propose simplement de soulager les soucis quotidiens de ces personnes », a indiqué Nadir Tayach à l’Express.
Pourtant, peu de données permettent d’attester de l’efficacité du safran, que cela soit pour le TDAH ou d’autres symptômes. Naali s’appuie sur une étude de 2019 réalisée par l’université de Téréhan sur 54 patients. Un résultat insuffisant selon Hugo Peyre, psychiatre et chercheur au CHU de Montpellier : « Pour prouver qu’un produit à visée thérapeutique est efficace et que ses dangers sont maîtrisés, il faudrait passer en revue plus de patients et faire confirmer ces résultats par d’autres essais cliniques. Il n’est pas possible de se baser sur une seule étude pour faire ce type de promesse, et encore moins de présenter l’épice comme une alternative. ». Il souligne notamment le risque d’arrêt du traitement par des personnes convaincues par l’argumentaire de la start-up.
De fait, s’il s’avère que les produits de Naali détiennent une efficacité similaire à celle de la Ritaline, leur vente sera bien plus encadrée : l’accord des autorités sanitaires serait indispensable, et s’appuierait sur des tests de grande ampleur. Les remèdes seraient alors considérés comme des médicaments, ce qui restreindrait les possibilités de publicité sur Internet et la mobilisation de témoignages de patients.
(Source : L’Express, 22.03.2025)