Une église protestante suspectée d’abus de faiblesse

Installée depuis 20 ans sur l’île de la Réunion, l’Église protestante Extravagance avec à sa tête le pasteur Bruno Picard, est soupçonnée d’abus de faiblesse et d’extorsion de fonds sur ses adeptes. Une enquête est menée par la brigade financière de Saint-Pierre.

En 2018, l’église aurait touché plus d’un million d’euros de dons. C’est le financement de cette structure qui suscite des interrogations de la part des autorités. Des enquêtes ont amené d’anciens fidèles à témoigner. L’un d’eux, ayant passé vingt ans dans le groupe, raconte qu’il est parti de l’organisation lassé de devoir rendre des comptes au pasteur aussi bien sur sa vie professionnelle que sexuelle. Les choix de vie des adeptes comme un mariage ou un nouveau travail doivent être soumis au pasteur. Pour cet ancien fidèle, au contact du pasteur les adeptes perdent progressivement leur esprit critique. Il admet aussi que les fidèles sont encouragés à toujours donner plus. Certains donnent beaucoup plus que les 10% de la dîme. Alors en couple, le témoin raconte avoir donné plus de 80 000 euros au groupe. La dîme n’est pas obligatoire mais encouragée : si les adeptes ne donnent pas ils désobéissent à Dieu. Plusieurs témoignages du même ordre montrent comment le groupe et ses dirigeants exerçaient une emprise sur les fidèles et en profitaient pour s’enrichir. Un témoin narre qu’elle a participé à l’élaboration d’un projet de réinsertion sociale à l’intention des détenus mais que les fonds récoltés via une plateforme ont disparu sans que le projet n’ait vu le jour.

Le pasteur se défend d’avoir commis des délits et déclare n’avoir rien à cacher sur les comptes de l’Église. Serge Fabresson, président de l’Adfi de La Réunion, rappelle que des familles ont contacté l’association ces trois dernières années, inquiètes pour leurs proches au sein du mouvement.

Pour Bruno Raffi, avocat et responsable du Centre contre les manipulations mentales à la Réunion, le groupe présente de nombreuses similitudes avec un mouvement sectaire notamment du fait de son organisation pyramidale où se trouvent au sommet des chefs qui s’accaparent les finances et gèrent la vie des fidèles. Le témoin interviewé par La Première a porté plainte contre le mouvement et le pasteur. Cette plainte a permis le début d’une enquête pour abus de faiblesse. Les enquêteurs vont aussi mener des investigations sur les ressources de l’association, sur les offrandes ; plus de la moitié est reversée aux pasteurs en activité sous forme d’indemnités plutôt que de salaires afin d’éviter le paiement de charges sociales.

(Sources : Zinfos, 17.03.2021 & La Première France TV Info, 18.03.2021)

 

  • Auteur : Unadfi