Une école Steiner des Hautes-Pyrénées dans le viseur de l’Académie de Toulouse

En février, plusieurs syndicats enseignants de la région Midi-Pyrénées s’étaient réunis autour d’une motion visant à alerter le Conseil Départemental de l’Education Nationale (CDEN) sur trois écoles privées hors contrat situées dans le département des Hautes-Pyrénées, et demandant plus de transparence sur leur fonctionnement de celles-ci. La motion vise en particulier deux établissement liés à la pédagogie Steiner : l’École Créative située à Benque-Molère qui s’appuie sur les pédagogies Montessori, Steiner et Freinet et l’Ecole Steiner des Boutons d’Or de Bigorre située à Bagnères-de-Bigorre.

Le collectif s’inquiète sur le manque d’informations concernant des liens possibles entre la pédagogie Steiner et l’Anthroposophie, de problèmes de sécurité et de lacunes éducatives repérées par l’inspection académique à l’Ecole des Boutons d’Or. Il demande que les contrôles de ces écoles soient présentés en CDEN et en CTSD (Comité Technique Spécial Départemental1) afin de remédier aux manquements de ces établissements.

Un dossier paru dans le journal La Montagne revient sur le cas particulier de l’Ecole des Boutons d’Or et pointe les dysfonctionnements repérés par une inspection de l’Éducation Nationale effectuée en mars 2020. Le journal donne également la parole aux parents des enfants qui y sont scolarisés et à Grégoire Perra qui livre une analyse de la pédagogie Steiner et de ses liens avec l’Anthroposophie.

L’école Steiner des Boutons d’Or de Bigorre a été soumises à deux contrôles du rectorat en 2020. Le premier le 5 mars et le second le 23 novembre.

Cette école, qui scolarise actuellement 68 élèves de la maternelle au CM2, a été fondée en 2013 via une structure associative qui accueillait au départ trois enfants dans un Jardin d’enfant, mais elle a vraiment pris de l’ampleur et sa forme actuelle en 2016.

Lors du contrôle inopiné du 5 mars, les quatre inspecteurs de l’Éducation Nationale ont constaté des manquements au niveau de l’hygiène et de la sécurité et une capacité d’accueil inadaptée par rapport au nombre d’élèves. Ce problème serait réglé, selon les parents, par un emploi du temps où les élèves sont par roulement en classe ou en activités à l’extérieur. Les inspecteurs ont aussi relevé des problèmes au niveau éducatif. Ainsi, le projet pédagogique ne serait toujours pas finalisé. Ils ont noté que « les élèves sont peu sollicités pour des activités faisant appel à leur discernement, leur opinion ». Ils reprochent l’absence de production d’écrits qui nuit à la construction « des capacités d’expression écrite et d’argumentation conformément aux attendus du socle commun ». Les sciences ne sont pas enseignées car les enfants ne sont pas assez matures pour les comprendre selon la directrice pour laquelle « il faut éviter de donner aux élèves une vision trop matérialiste du monde car il existerait différentes interprétations possibles aux phénomènes naturels »2. L’histoire n’est pas enseignée non plus, mais pour les parents ce n’est pas gênant puisque les enfants étudient la mythologie !

Les parents d’élèves interrogés par la Montagne balaient d’un revers de main tout lien avec l’Anthroposophie. Qu’Henri Dahan, ancien délégué général de la Fédération des Écoles Steiner et ancien directeur pédagogique du Domaine des possibles, soit membre de l’école et de son fond de dotation, ne serait pas une preuve des liens de l’Anthroposophie avec l’école. Cela n’a rien d’étonnant selon Grégoire Perra, car depuis les débuts du mouvement, Rudolf Steiner a fait en sorte que les liens entre les deux structures restent officieux. Les écoles n’adhèrent pas à la Société Anthroposophique, les adhésions se faisant à titre individuel. Et pourtant, affirme Grégoire Perra, les deux seraient intimement liées et des conceptions spirituelles anthroposophes seraient constamment distillées pendant les cours, sans que les enfants et les parents en aient conscience. Ce manque de transparence est l’un des principaux reproches de Grégoire Perra qui alerte depuis des années sur les risques d’endoctrinement des élèves.

Le contrôle du 23 novembre a, quant à lui, révélé un grand flou au niveau administratif. La liste du personnel n’était pas à jour et le registre d’inscription des élèves n’était pas renseigné depuis juin 2020. La liste du personnel, finalement transmise au rectorat, recense huit professeurs, et onze intervenants, dont cinq services civiques.

Les nombreux travaux de mise en conformité demandés par l’inspection académique seront effectués par les parents qui confirment donner « un nombre incroyable d’heures de bénévolat pour que cette école vive et puisse fonctionner ».

(Sources, Motion sur les écoles privées hors contrat, 09.02.2021 & La Montagne, 05.03.2021)

1 Instance où se rencontrent l’Inspecteur d’Académie (IA) Directeur des services académiques de l’Éducation Nationale (DASEN)

2 Pour les anthroposophes le matérialisme est lié au dieu du mal Ahriman.

 

  • Auteur : Unadfi