Les Douze Tribus : la secte qui prêche la maltraitance des enfants et l’esclavage

Les témoignages d’anciens adeptes des Douze Tribus (Tabitha’s Place) ont permis de révéler les méthodes coercitives et violentes envers les enfants de la communauté. Ces récits décrivent plus largement les difficiles conditions de vie des membres.

Issue du mouvement pacifiste hippie, la communauté s’est progressivement transformée en groupe religieux. Marsha Spriggs, co-fondatrice du groupe avec Elbert Eugène Spriggs, déclarait que les noirs étaient indubitablement destinés à devenir des esclaves, que les homosexuels méritaient la mort, que les enfants devaient être battus et que le devoir des femmes était d’obéir aux hommes. La communauté exige des nouveaux membres qu’ils rompent définitivement avec leur passé, qu’ils se débarrassent de tout ce qui y a trait, y compris leur argent et leurs biens dont ils doivent faire don au groupe. Tous veulent vivre une vie simple dans l’espoir de plaire à Dieu mais tous ne vivent pas de la même manière : il y a les pauvres qui disposent de ce que la communauté leur donne et les riches qui ont des ordinateurs, un accès à Internet et à l’information. Les femmes sont rarement autorisées à parler et ont le devoir de donner naissance à de nombreux enfants. Une femme qui n’est pas enceinte après trois mois de mariage est réprimandée par le groupe. Les membres de la communauté ne vont pas chez le médecin à moins d’une blessure sérieuse. Les cas de mort-nés sont si nombreux que les adeptes ont dû créer leur propre cimetière à Island Pond (Vermont) où se trouvent plusieurs tombes anonymes d’enfants.

Le modèle imposé par Marsha Spriggs , et qui perdure encore aujourd’hui, empêche les adeptes d’être eux-mêmes, d’être des humains : « Vous êtes tellement absorbé par les enseignements que vous perdez toute émotion et toute capacité à réagir à des situations » déclarait Joellen Griffin, ancien membre, au Boston Herald en 2001.

La communauté estime que sa littérature interne constitue à elle seule la loi : « Les gouvernements de Sparte, de l’Allemagne hitlérienne ou de la Russie communiste ont usurpé le rôle des parents, et aujourd’hui l’autorité parentale est mise à mal aux États-Unis par l’éducation publique obligatoire, les organismes de défense des enfants, et les lois de protection de l’enfance. Les parents ne doivent pas permettre au gouvernement d’usurper l’autorité des parents que Dieu a désignés comme uniques responsables. »
Selon les membres, les châtiments corporels sont clairement enracinés dans leur lecture littérale des Actes des Apôtres et dans leur littérature interne comme le Manuel de formation de notre enfant : « La tige de bois doit être utilisée pour corriger les mauvaises pensées, les mauvaises paroles ou actions. Entraînez votre enfant à se soumettre, à se courber docilement. » Ou encore « La discipline est essentielle. Si vous ne punissez pas votre enfant, selon les Écritures, vous n’entrerez pas dans le Royaume des Cieux. »

Les membres des Douze Tribus prétendent qu’il ne s’agit pas d’abus mais du respect de leurs croyances. « Nous croyons aux châtiments corporels, et nous tenons à cela, mais nous ne croyons pas à la maltraitance des enfants par tous les moyens » a déclaré Zahar, membre encore actif, dirigeant une boulangerie de la communauté. Il ajoute : « Et nous pensons que beaucoup des problèmes que vous voyez dans le monde d’aujourd’hui auraient sans doute pu être évités si les enfants comprenaient la cause et les conséquences de leurs actes. »

Kayam Mathias était battu 20 à 30 fois par jour mais le plus dur pour lui était d’entendre les cris de sa petite soeur alors qu’elle n’était qu’un bébé. Son impuissance à pouvoir la défendre l’a brisé. Il a raconté comment il avait dû grandir en devenant insensible à la violence qui l’entourait et en réprimant la rage qui était en lui. Il a aujourd’hui 22 ans, il a quitté les Douze Tribus à l’âge de 14 ans et pourtant ses souvenirs d’enfance continuent de le hanter. Pour ceux qui quittent les Douze Tribus, le processus d’intégration dans la société est difficile et génère beaucoup de stress : « Pour les personnes qui quittent le groupe, il faut environ cinq ans pour se sortir de la dépression, du dégoût de soi, du doute, du désespoir » raconte l’un d’eux.

Selon la communauté, le multiculturalisme est contre nature, il est facteur de crimes et de préjugés et va à l’encontre de ce que l’homme est véritablement. Les sermons de Spriggs sont clairs : « Martin Luther King et d’autres ont été inspirés par le mal », « l’esclavage est le seul moyen pour certaines personnes d’être utiles dans la société. Elles ne feraient rien de productif si elles n’étaient dans l’obligation de faire. Ce serait des vauriens. »

« Est-ce que les Douze Tribus sont une secte religieuse coupable de manipulation, de népotisme, d’élitisme, en dépit de leurs idéaux d’égalité pour tous ? Oui ! Est-ce que les Douze Tribus ont un leadership constitué de fondamentalistes religieux égocentriques ? Oui ! Y a-t-il des maltraitances d’enfants au sein des familles des Douze Tribus ? Oui ! Est-ce que les Douze Tribus ont un discours trompeur au sujet des races ? Oui ! »
« Est-ce que tous les membres des Douze Tribus adhèrent à ses enseignements ? Non ! », conclut un ancien membre.

(Source : Daily Beast, 17.07.2016)

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