Plusieurs scandales ont déjà secoué les congrégations de l’Eglise. Pourtant, les signalements obligatoires et les enquêtes indépendantes ne sont pas imposés lorsque l’organisation est avertie de cas inquiétants.
Parmi un groupe d’anciens Témoins de Jéhovah victimes d’abus, Rhiannon, une quarantenaire, explique comment un signalement aurait pu « modifier le cours de sa vie ». Victime de pédophilie à 11 ans, elle raconte, avec d’autres, que le groupe religieux enquête seulement en interne lorsqu’un cas est rapporté. Agressée sexuellement pendant 6 ans par un certain Peter Stewart rencontré dans sa congrégation religieuse, Rhiannon découvrit par la suite ne pas avoir été la seule enfant touchée. Or trois chefs de l’Eglise, décédés aujourd’hui, avaient enquêté sur ces allégations à l’époque. Stewart admettait même certains abus, comme en attestent des documents judicaires retrouvés par The Telegraph. Il aurait alors été rétrogradé au poste de « serviteur ministériel » sans qu’aucun dirigeant ne le signale jamais à la police. La possibilité qu’il s’en prenne à d’autres enfants persistait pourtant. D’après d’autres papiers retrouvés, les Témoins de Jéhovah disposaient d’une liste de cinq enfants « à risque » avec Stewart. Ce-dernier avait même écrit une lettre d’excuse à une victime, en se qualifiant de « pervers ». L’un des dirigeants de la congrégation, Alan Orton, mort depuis, l’avait déchirée.
Pour l’ensemble des victimes et anciens adeptes, l’impératif de recourir à des experts impartiaux semble une évidence maintenant. Au Royaume-Uni, l’IICSA (Independent Inquiry into Child Sexual Abuse) a été lancée en 2014 par Theresa May pour examiner les abus présumés dans les organisations religieuses comme dans les foyers pour enfants. Seule lacune de ce projet : aucune obligation légale ne contraint à mener ces enquêtes, y compris dans les écoles. Des « orientations statutaires » peuvent simplement guider. Les réfractaires au signalement obligatoire pensent qu’une telle mesure générerait bien trop de cas et qu’il deviendrait difficile par conséquent d’identifier les victimes. De leur côté, les Témoins de Jéhovah affirment avoir une nouvelle politique de protection de l’enfant qui oblige les dirigeants de l’Eglise à signaler tout abus à la police dès lors qu’un mineur semble en danger.
(Source : The Telegraph, 19.10.2022)