Le mot secte a pris un sens particulier le 4 octobre 1994 jour où une paisible station de ski du Québec fut le théâtre d’un drame meurtrier : 5 membres de l’Ordre du Temple solaire (OTS) périrent dans des circonstances étonnantes. Deux corps carbonisés, trois poignardés (dont un bébé), les restes de dispositifs incendiaires à retardement, furent autant d’indices qui laissent à penser que leur mort avait été préméditée. Ce drame fut le premier d’une série macabre gravée dans l’histoire des mouvements sectaires.
Le lendemain, en Suisse, 48 autres adeptes du Temple solaire furent retrouvés morts : 23 corps dans une ferme incendiée dans le canton de Fribourg et 25 autres dans le canton du Valais. Parmi les victimes figuraient plusieurs personnalités québécoises, dont le maire de la ville de Richelieu et son épouse, journaliste au journal de la ville de Québec et conseiller principal au ministère des Finances du Québec. Figuraient également Luc Jouret et Joseph Di Mambro, fondateurs de la secte.
Puis, treize autres membres de l’OTS, et trois enfants, ont trouvé la mort en 1995 en France, dans le Vercors.
Enfin, en mars 1997, la police a découvert cinq corps carbonisés à St Casimir, à environ 80 kilomètres de la ville de Québec.
En Suisse, La police a immédiatement pensé à un meurtre rituel. Les corps étaient disposés en cercle, les têtes tournées vers l’extérieur. Beaucoup avaient été drogués, d’autres avaient un sac en plastique sur la tête, d’autres encore avaient reçu une balle dans la tête, tandis que les dirigeants du cercle restreint avaient été empoisonnés.
Après les drames, le juge d’instruction a ordonné la destruction des deux fermes helvètes : « Tout ce qui était chapelle, ornements liturgiques… tout a été brûlé sous l’oeil des caméras de télévision. Comme s’il fallait vite exorciser tout ça. » se souvient Arnaud Bédat, journaliste suisse.
Avec des motivations apparemment insaisissables, des scènes de crime insolites et des preuves disparues, deux thèses se sont opposées : le suicide volontaire pour les uns, le meurtre pour les autres1.
Le dogme de l’Ordre du Temple Solaire mêle catholicisme, croyances rosicruciennes, croyances égyptiennes, chamanisme, rituels mystiques de type templier, mais aussi théorie apocalyptique. Cette secte a attiré de hauts dignitaires de la province. Attirés par des conférences sur l’amour ou le développement personnel, les membres furent rapidement convaincus que la mort par immolation pouvait leur permettre de démarrer une nouvelle vie sur la planète « Sirius ». Le mouvement était officiellement dirigé par deux hommes. Le premier, Luc Jouret, médecin belge, « recruteur » du mouvement, prétendait être la réincarnation de Jésus. Le second, Joseph Di Membro, français, avait été soupçonné de contrebande d’armes et de blanchiment d’argent.
Dans les années 1993, l’OTS avait fait l’objet d’une enquête parce que des membres étaient soupçonnés de détention illégale d’armes et du meurtre du ministre québécois de la Sécurité publique de l’époque. La police suspectait déjà le projet de suicide collectif. Après les perquisitions de la police, Jouret suivi par d’autres membres se sont enfuis en Suisse prétextant que la présence policière avait « contaminé » leur refuge.
« La pureté à laquelle l’adepte est arrivé va contribuer à l’enfermer dans ce qu’on connaît comme étant la mécanique de l’emprise », explique Jean-Pierre Jougla, spécialiste du phénomène sectaire. Pour ne pas être en contact avec les énergies et vibrations des clients précédents, les membres emportaient un coussin lorsqu’ils allaient au restaurant.
Après la mort des 74 membres, l’OTS a semblé disparaître du paysage sectaire. Mais est-ce vraiment le cas ? Un troisième homme également soupçonné d’avoir joué un rôle essentiel est toujours en vie. Il s’agit d’un chef d’orchestre suisse de renommée internationale, jugé puis acquitté à deux reprises pour association avec une « organisation criminelle »2, l’OTS.
(Source : Radio Canada International, 04.10.2018 & France Info, 07.10.2018)
1. Lire sur le site de l’UNADFI, Les massacres de l’OTS expliqués à mon petit-fils : https://www.unadfi.org/wp-content/uploads/2017/02/Les-massacres-OTS-expliques-a-mon-petit-fils.pdf
2. En France en 2001 et en Suisse en 2006.