Quelles connexions idéologiques entre le survivalisme et certains groupuscules d’extrême droite ?  

En Belgique, les liens entre la doctrine issue de la collapsologie et les projets politiques d’une droite ultraradicale inquiètent.

Un militaire d’extrême droite, en fuite et armé, avait voulu s’en prendre au virologue Marc Van Ranst en 2021. Cette année, un nouveau projet criminel organisé par des sympathisants d’extrême droite en Flandre a mené la police jusqu’à une importante quantité de munitions et du matériel militaire. Troisième affaire de même nature : Yannick V, en faveur d’une dictature militaire, a été abattu à la suite d’un échange de tirs avec les unités spéciales. Lui aussi revendiquait sa proximité avec l’extrême droite et appartenait à une mouvance survivaliste. Cette situation est emblématique du rapprochement observé depuis dix ans entre la droite radicale et la doctrine annonçant la fin du monde. Le politologue Stéphane François analyse les origines de ces affinités idéologiques : « le point de départ est la crainte ressentie outre-Atlantique d’une invasion de l’URSS et d’une guerre nucléaire ». Sont aussi apparues la peur d’une disparition du pétrole ou celle d’une surpopulation mettant en danger notre équilibre écologique. Des auteurs comme Jean Raspail, Renaud Camus ou Samuel Huntington ont successivement contribué à nourrir des inquiétudes sur la pression démographique venant du Sud, le « grand remplacement » et le « choc des civilisations ». L’idée d’une guerre avec les pays arabo-musulmans ou la perspective de nouvelles maladies ajoutent du grain à moudre aux théories survivalistes, tout comme à certains mouvements pessimistes d’extrême droite, préoccupés pour l’avenir des « peuples blancs » (Eric Zemmour). L’intérêt pour ces thématiques dans la culture populaire, au cinéma ou dans les séries participe à la diffusion d’idées collapsologues. De la même manière, le premier salon du survivalisme en mars 2018 à Paris a réuni des courants très divers autour de ce sujet. Au programme de l’évènement : survie urbaine, cours de systema, de botanique, permaculture, premiers secours, vente de matériel de camping, ou de couteaux…

En France, le réseau « Recolonisons la France » démantelé en 2021 rassemblait des militaires armés, préparés à une « guerre civile imminente ». Le néosurvivaliste Frederik Limol, abattu par des gendarmes dans l’Hérault en 2020, était systématiquement équipé de ses rations de survie. Autant dire que les cas conjuguant doctrine survivaliste et théories d’extrême droite se multiplient. Ce qui ne signifie pas pour autant que leurs idées sont nécessairement et intrinsèquement liées.

Certains, craintifs de l’effondrement à venir, lisent des revues, des sites, visionnent des vidéos sur le sujet. Ils ne sont d’ailleurs pas tous politisés. D’autres mettent en application et de manière radicale leur doctrine. Les uns cherchent uniquement à se protéger, les autres n’envisagent ce projet que par des agressions ou des actes de terrorisme. On peut aussi distinguer des initiatives survivalistes individualistes des solidaires.

En Belgique, les autorités ont décidé de porter leur vigilance sur le caractère extrémiste des discours ou des actions et la propension à s’inscrire hors de tout cadre légal.

(Source : levif.be,  10.10.2022)

  • Auteur : Unadfi