Après avoir répondu aux questions de Bulles [Bulles n°108, pages 14 à 20, décembre 2010] sur le chamanisme traditionnel, mis en évidence la nature ambiguë du chaman, évoqué les croyances et rituels dont le personnage était tout à la fois le gardien, l’inspirateur et le maître d’œuvre, attiré également l’attention sur la préoccupation des anciens confrontés à la prolifération des usurpateurs, Guy Rouquet, président de [Psychothérapie Vigilance, aborde dans cet article la question des pratiques médicales chamaniques.
Phénomène magico-religieux, le chamanisme propose-t-il, comme le prétendent certains, une médecine en mesure de rivaliser avec la médecine internationale conventionnelle ?
Le rapport particulier que les peuples autochtones entretiennent avec le monde invisible est inséparable de leur explication de l’origine des maladies. La cause en est surnaturelle : le patient est la victime d’une attaque d’esprits déclenchée par un sorcier hostile, que seul un désenvoûteur expérimenté peut contrecarrer. Le chaman remplit non seulement la fonction de guide spirituel mais aussi de guérisseur dans les sociétés claniques ou tribales. D’ailleurs, en Amérique du Nord, on l’identifie souvent sous le nom d’homme-médecine. Grâce à sa connaissance des plantes locales, aux secrets transmis par son maître et aux facultés développées lors de son apprentissage, il est en mesure de traiter certaines plaies et divers dérèglements de l’organisme. Rien d’extraordinaire à vrai dire. Pour calmer la douleur, cicatriser une blessure, réparer un membre brisé, contenir une fièvre ou un délire, les hommes ont acquis au fil des âges une expérience, dont le chaman ou son substitut est le dépositaire par excellence. Il sait que telle plante, écorce ou racine a des propriétés vulnéraires, purgatives ou narcotiques, telle source des vertus bénéfiques pour les troubles digestifs, respiratoires ou articulaires. Les bienfaits ressentis par les patients contribuent à conforter son autorité, associée aux forces mystérieuses qu’il est censé contrôler.(…)