La Cour européenne de justice met en garde les Témoins de Jéhovah sur la collecte des données personnelles

Un arrêt rendu le 10 juillet 2018 par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) déclare que les prédicateurs Témoins de Jéhovah (TJ) doivent obtenir le consentement des personnes visitées avant de recueillir leurs données.


La CJUE estime que la collecte des données effectuées par les prédicateurs Témoins de Jéhovah lors du porte-à-porte ne relève pas d’une activité purement personnelle ou domestique mais rentre bien dans le cadre de la protection des données personnelles. L’objet d’une activité qui « est de rendre des données à caractère personnel accessibles à un nombre indéfini de personnes » ne relève pas de la sphère privée. Et c’est bien le cas chez les TJ, les données collectées étant transmises aux différentes paroisses avec l’objectif de « diffuser la foi de la communauté auprès de personnes extérieures au foyer du prédicateur ».

La Cour a aussi considéré qu’une communauté est co-responsable du traitement des données collectées par ses membres lorsqu’elles le sont « dans le cadre d’une activité de prédication de porte-à-porte organisée, coordonnée et encouragée par cette communauté, sans qu’il soit nécessaire que ladite communauté ait accès aux données ni qu’il doive être établi qu’elle a donné à ses membres des lignes directrices écrites ou des consignes relativement à ces demandes. »

La CJUE a précisé que même collectées manuellement, les notes prises lors du porte-à-porte, n’échappent pas au texte sur le traitement automatisé de fichiers, le champ d’application de ce texte étant étendu « au traitement non automatisé de données à caractère personnel contenues ou appelées à figurer dans un fichier ». Dans le cas des Témoins de Jéhovah, les notes collectées lors du porte-à-porte sont « structurées selon des critères déterminés permettant de les retrouver aisément aux fins d’une utilisation ultérieure ».

Cette affaire avait été soulevée en 2013 par le contrôleur de la protection des données de Finlande qui avait interdit aux TJ de collecter ou traiter des données à caractère personnel, en particulier lors du porte-à-porte, car il estimait que ces pratiques ne respectaient pas la législation finlandaise. Les TJ ont fait appel devant le tribunal d’Helsinki qui a statué en leur faveur. Cette décision a aussitôt été attaquée devant la Cour suprême de Finlande qui a, à son tour, saisi la CJUE d’une série de questions préjudicielles auxquelles elle a répondu dans son arrêt du 10 juillet.

La loi européenne sur la protection des données, entrée en vigueur en mai 2018, s’applique aux entreprises, aux sociétés commerciales, aux partis politiques, aux associations, mais également aux groupes religieux lorsqu’ils collectent des données. Par exemple, l’Église d’Angleterre avait publié au début de l’année 2018 des directives avertissant qu’il faudra désormais obtenir la permission des personnes pour lesquelles des prières seront dites si les « informations les concernant devaient être publiées sur un site web,…).

Un porte-parole de la branche anglaise des TJ a, quant à lui, déclaré que « les Témoins de Jéhovah analyseront attentivement la décision et examineront comment les gouvernements de l’Union européenne interprètent cet arrêt.

(Sources : Next Impact, 10.07.2018, Euronews, 10.07.2018, Legalis.net, 12.07.2018 & The Telegraph, 15.07.2018)

Lire sur le site de l’Unadfi : Prises de notes interdites ? : https://www.unadfi.org/groupes-et-mouvances/prises-de-notes-interdites/