Japon / Les victimes d’Aum Shinrikyo craignent la résurgence de la secte

Près de 19 ans après l’attaque des membres de la secte Aum Shinrikyo au gaz sarin qui a fait 13 morts à Tokyo, les victimes mettent en garde contre le groupe apocalyptique qui constitue toujours une menace pour la société japonaise.


À ce jour, 190 membres d’Aum ont été inculpés pour des crimes allant de l’assassinat à l’enlèvement, la production d’armes et la création de gaz neurotoxique. Treize personnes ont été condamnées à mort, y compris leur chef, Asahara.

Le jugement, un peu tardif, du dernier membre de la secte incriminé, Makoto Hirata, semble perturber les rescapés qui doivent revivre le drame des années après.

Les victimes et les parents de ceux qui ont péri dans l’attentat appellent les autorités au devoir de mémoire. « Nous devons continuer à parler de l’attentat du métro parce que des jeunes rejoignent encore Aleph » a déclaré Shizue Takahashi qui a perdu son mari dans l’attentat et dirige l’association de victimes de Tokyo, se référant à la nouvelle appellation du groupe qui continue sur les bases de Ashara. Beaucoup de jeunes Japonais n’ont aucun souvenir de ce que c’était que de vivre dans une ville qui a été la cible d’une attaque terroriste. De plus rappelle Shizue Takahashi : « Notre culture japonaise nous invite à oublier rapidement le passé surtout quand les souvenirs sont pénibles ». « Mais nous devons continuer à rappeler aux gens le cas du gaz sarin. Sinon, il pourrait se produire à nouveau. »

Selon la police, il n’y avait pas moins de 11 400 sectes religieuses enregistrées à travers le Japon en 1995, allant du devin moderne affirmant qu’il pouvait lire l’avenir des gens selon la forme de leurs pieds, à des groupes habillés tout en blanc mettant en garde contre une planète inconnue du système solaire sur le point de déclencher des tremblements de terre et d’importants tsunamis.

Le nombre de ces sectes a considérablement diminué depuis les attentats au gaz sarin, mais la police pense que ces chiffres repartent à la hausse. Le nombre de mouvements présents au Japon est aujourd’hui estimé à 1650.

Selon l’avocat des familles, Yuji Nakamura, Aum-Aleph compterait encore aujourd’hui 1500 personnes. D’après lui, le problème n’est pas uniquement japonais : « Ils avaient des adeptes à travers le monde, de sorte que cette préoccupation est mondiale ».

L’avocat pense qu’ « il y a beaucoup de gens, faibles mentalement, qui ont besoin du soutien d’autres personnes qu’ils admirent et en qui ils ont confiance ». L’ancien instructeur de yoga Shoko Asahara faisait partie de ceux-là en prétendant qu’il était la réincarnation d’un dieu. « Cette secte a mis au point une technique pour attirer ces gens afin de les amener dans l’organisation en leur faisant croire qu’ils étaient importants ».

Ces tactiques fonctionnent encore aujourd’hui sur des personnes suffisamment déçues par la vie moderne du Japon pour être sensibilisées par le discours des membres du groupe. Ces membres, sensés être des passionnés de yoga, ne révèlent pas leur véritable appartenance et leur dévouement, toujours vif, à Asahara.

Source : Deutsche Welle, 13.03.2014