Gabriel Loison écope une nouvelle fois de 15 ans de prison 

Déjà condamné à plusieurs reprises, Gabriel Loison, le gourou fondateur de l’Université de la relation, a été condamné, jeudi 2 juin, à 15 ans de prison par la cour criminelle de Loire-Atlantique pour viols, complicité de viol en réunion et abus de faiblesse sur quatre anciens adeptes, trois femmes et un homme.

Le gourou âgé de 82 ans a vu sa nouvelle peine confondue avec celle de 15 ans prononcée en 2017 pour les viols d’une adolescente de 13 ans et d’une jeune femme de 28 ans. Les remises de peine dont il pourrait bénéficier pour bonne conduite lui permettraient éventuellement de sortir de prison en décembre 2023. Il est en détention depuis 2011.

Les quatre plaignants, parmi lesquels figurait son ex-compagne, attendaient du procès « une libération ». Ils se sont vus reconnaître le statut de victimes et seront indemnisés d’un montant qui sera fixé lors d’une audience ultérieure.

L’accusé qui se présentait comme anthropologue, psychothérapeute et sophrologue, fut, jusqu’en 1994, à la tête des Ateliers de Saint-Jean, un institut basé dans l’Hérault. Il fonda ensuite Les Jardins de la vie, dans les Pyrénées-Orientales. Epinglée comme secte par le rapport parlementaire « Les sectes en France » en 1995, cette association fut dissoute la même année. Finalement Gabriel Loison  s’est installé dans la région nantaise et a fondé, en 1996, l’Université de la nature et de l’écologie de la relation où il forme des « maîtres de santé » lors de stages en France, mais aussi en Espagne ou au Costa Rica. Son parcours s’est terminé en 2011 lorsque son ex-compagne et lui furent arrêtés en Espagne.

Les voyages faisaient partie d’un processus d’initiation visant à mettre les nouveaux adeptes au cœur d’un système d’emprise dont la mise en évidence a été l’un des objets du procès. Maître Jean-Pierre Jougla, cité à comparaître en tant qu’expert du sujet, explique que « dans un groupe sectaire, il n’existe rien d’autre que la constitution d’un territoire enfermé par des frontières. » « Seul le gourou pose la loi et il ne viendra jamais à l’esprit d’un adepte de la remettre en question. »

Pour les deux policiers de l’Office central pour la répression des violences aux personnes, qui ont enquêté sur l’affaire, le « contexte sectaire ne fait aucun doute ». Son mouvement réunit « quatorze ou quinze critères » de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes).

L’avocat général, quant à lui affirme : « Gabriel Loison n’était pas pris de « folie » mais d’un « délire qu’il a construit depuis soixante-dix ans » en instituant des « lois de vie exclusives » ».

Le schéma opératoire du gourou pour mettre ses adeptes en état de sujétion était toujours le même. Les nouveaux arrivants étaient recrutés lors de conférences sur la nutrition, la sexologie ou des sujets ésotériques. Un questionnaire permettait ensuite de faire le tri et d’en savoir plus sur leurs « angoisses, leur état de santé, leur sexualité, leur relationnel, leurs centres d’intérêt ».

Suivait une initiation en trois étapes, la première au Maroc, la seconde, un séjour de trois semaines facturé 10 000 euros, se déroulait en Espagne ou au Costa Rica. Puis venait enfin un stage de 72 jours au cours duquel avaient lieu des relations sexuelles de groupe sous couvert de pratiques tantriques.

Avide de relations sexuelles, le gourou avait bâti un système dont les activités reposaient « essentiellement sur la sexualité » qui était présentée comme un moyen d’évolution ou « prescrite comme remède contre des blocages. »

L’ex-compagne de Gabriel Loison, jugée pour complicité et acquittée lors du premier procès, était cette fois sur le banc des parties civiles. Agée de 48 ans, la femme a décrit l’emprise et les violences sexuelles subies durant les cinq années où elle a été sa partenaire. Elle dit avoir été « un terrain d’exploitation » pour le gourou, avoir subi un « lavage de cerveau ». Elle lui reproche aussi de l’avoir coupée de la société en lui inculquant un langage particulier qui a rendu difficile sa réadaptation après sa sortie du groupe.

L’ancien gourou a beau dénoncer une « culture du mensonge » à son encontre lors du procès, à quelques exceptions près, les témoignages sont accablants. Les plaignants et d’autres témoins venus s’exprimer à la barre accusent aussi Gabriel Loison de coups et d’humiliations. Un coach de vie, âgé de 52 ans, qui n’a jamais déposé plainte, explique les pressions vécues au sein du groupe : « À chaque clash ou tension assez forte, on isolait les brebis galeuses : elles devaient se soumettre si elles voulaient intégrer le groupe. » Lors de son initiation de trois semaines en Espagne en 2010 il avait interdiction de parler à d’autres personnes de son entourage.

Le seul homme à être partie civile dans ce nouveau procès a vécu bien pire encore. Aujourd’hui âgé de 36 ans, il avait quitté la faculté de sociologie à 20 ans, pour rejoindre « l’université » de Gabriel Loison. C’est la mère de son meilleur ami, elle-même plaignante, qui l’avait recruté. Aspirant à changer le monde, il a eu l’impression que le groupe allait lui permettre d’accomplir « une mission très importante pour la planète ». A l’approche de l’apocalypse Maya annoncée pour 2012, il avait le sentiment de faire partie des initiés, contrairement aux « gens à jeter qui ne passeront pas le changement de l’humanité « , aussi qualifiés de « reptiliens », de « larves » par les membres de la secte.

Ayant subi, au cours d’un séjour, une « sodomie punitive » avec un objet infligée par plusieurs membres de la secte, il s’est senti pourtant coupable de certains de ses comportements et a eu beaucoup de difficultés à se considérer comme victime. Le processus d’initiation comprenant des « massages énergétiques », une introduction à la « sexualité sacrée », des partouses, il avait été conditionné « à ne pas tenir compte du manque de consentement de certaines personnes ». « Gabriel Loison, son truc, c’est de séduire les femmes et d’en faire des objets sexuels. Et d’humilier les hommes, de temps en temps. » ajoute-t-il.

Le jeune homme a, en outre, perdu beaucoup d’argent dans la secte. En cinq ans, il a contracté « cinq ou six emprunts » pour financer les enseignements et les séjours. 

(Sources : Ouest France, 29.05.2022 & 30.05.2022 & 31.05.2022 & 01.06.2022 & Le Figaro, 02.06.2022 & 20 Minutes, 03.06.2022 & Actu, 03.06.2022)

  • Auteur : Unadfi