Alex Batty avait disparu en Espagne il y a 6 ans. Aujourd’hui âgé de 17 ans, il a été retrouvé, ce 13 décembre, alors qu’il marchait en pleine nuit au bord d’une route près dans la région de Toulouse.
C’est une histoire incroyable. Alex avait 11 ans quand, le 30 septembre 2017, il a quitté le Royaume-Uni pour passer des vacances à Marbella, en Espagne, avec sa mère, qui n’en avait pas la garde, et son grand-père. Mais contrairement à ce qui était prévu, il n’est jamais rentré chez sa grand-mère à laquelle il avait été confié. Des recherches poussées, avec l’aide des autorités espagnoles, n’avaient pas permis de le localiser. La dernière fois qu’il aurait été vu, c’est le 8 octobre de la même année, sur le port de Malaga. En 2018, sur la BBC, la grand-mère avait déclaré qu’elle soupçonnait la mère d’Alex de l’avoir enlevé parce qu’elle ne voulait pas qu’il aille à l’école et qu’elle cherchait un mode de vie alternatif .
Mercredi 13 décembre, vers 2 h du matin, c’est un livreur de médicaments qui a, par hasard, retrouvé l’adolescent aujourd’hui âgé de 17 ans, alors qu’il marchait sur le bord de la route, du côté de Chalabre, dans l’Aude, à une centaine de kilomètres au sud-est de Toulouse. Intrigué de le voir là, sous la pluie et en pleine nuit, avec un sac-à-dos et un skate sous le bras, il l’a invité à monter dans son véhicule. Le garçon, qui ne parle pas beaucoup français, lui aurait dans un premier temps dit qu’il s’appelait Zach. Puis il aurait finalement confié « avoir été enlevé par sa mère et être arrivé en France en 2021 » témoigne-t-il dans La Dépêche du midi. Il aurait expliqué « être parti d’une communauté itinérante qui ne lui plaisait pas pour retrouver une vie normale et surtout sa grand-mère ». Il aurait marché durant quatre jours dans la montagne. Le livreur de 26 ans, par ailleurs étudiant en chiropractie, l’a alors conduit, avec son assentiment, à la gendarmerie de Saint-Félix-Lauragais où il a été confié à la brigade de recherches. Le jeune homme était semble-il assoiffé mais pas stressé. Après un contact avec les autorités de Manchester, d’où il est originaire, son identité a été confirmée. Ainsi sa grand-mère, qu’il a pu joindre par téléphone, et qui a déclaré au journal britannique The Sun « qu’il n’y avait pas de doute et à quel point elle était émue ».
Des zones d’ombre à éclaircir
Après avoir été entendu par les enquêteurs, le jeune homme a été pris en charge par les services sociaux de Haute-Garonne puis rapatrié en Grande-Bretagne, à Oldham. Des policiers de Manchester sont, eux, arrivés en France pour vérifier l’intégralité des propos du jeune Anglais et tenter d’éclaircir des zones d’ombre. Selon eux, « les investigations seront complexes et de longue durée ». On estime notamment qu’il faudra du temps à Alex Batty pour qu’il puisse raconter de manière détachée et plus objective ce qu’il a réellement vécu. La vie en groupe facilite l’utilisation d’un langage interne dont les codes sont difficiles à déchiffrer pour quelqu’un de l’extérieur.
Lors d’une conférence de presse qui s’est tenue ce 17 décembre, Antoine Leroy, procureur adjoint de Toulouse, a expliqué que le garçon avait vécu une vie de nomade pendant 6 ans au sein d’une communauté spirituelle. D’Espagne, il aurait été emmené par sa mère et son grand-père au Maroc puis en France où il aurait séjourné entre l’Aude et l’Ariège. Décrit comme un adolescent « calme et d’une intelligence vive », il n’aurait, selon le magistrat, « pas évoqué de violences physiques » et aurait juste concédé que « sa mère était un peu folle ». Il aurait décidé de partir quand cette dernière lui aurait annoncé son intention de rallier la Finlande, « où elle se trouve probablement désormais » estiment les enquêteurs. Le grand-père, lui, serait décédé il y a 6 mois. Mais le conditionnel reste de mise puisque des voisins du gîte La Bastide, dans l’Aude, où il travaillait comme homme à tout faire, affirment qu’il y serait toujours mais se ferait appeler Peter et non plus David…
Le jeune homme n’aurait jamais parlé de secte. Mais plutôt de communauté. Pour Simone Risch, présidente d’Infos Sectes à Toulouse, « la rupture avec la société, la déscolarisation, l’isolement et la vie en autarcie sont souvent les prémices d’un basculement vers un mouvement sectaire. Si le choix d’un mode de vie alternatif ne constitue pas en soi une dérive sectaire, il faut tout de même rester vigilant sur l’évolution de ces organisations. Certaines se renouvellent très vite, par le biais des réseaux sociaux, et peuvent afficher un autre visage ».
(Sources : Le Figaro & BFM & Sunday Times, 14 et 16.12.2023)