Échec de prédiction et dissonance cognitive

En 1956, trois psychologues américains, Leon Festinger, Henry Riecken, et Stanley Schachter ont cherché à analyser comment des individus réagissaient suite à l’échec ou à la réfutation d’une croyance à laquelle ils croyaient fortement.(1) Pour cela, ils ont suivi et étudié un groupe aux croyances ufologiques et apocalyptiques.

Ce groupe était dirigé par Marion Keech, une ménagère de Chicago, prétendant recevoir des messages de la planète Clarion. Elle aurait ainsi été avertie d’une fin du monde imminente, un déluge qui engloutirait la terre le 21 décembre 1954. Les adeptes de Keech, fortement convaincus par leur leader, quittèrent leurs emplois, leurs conjoints et distribuèrent leurs biens. Ils étaient prêts à partir à bord d’un vaisseau spatial envoyé par les extraterrestres.
 

Le jour dit, rien ne s’est produit et les psychologues ont pu observer les réactions des membres. .Au début, ils étaient abasourdis et se sont confinés dans le silence. Puis Marion Keech a rapidement repris la situation en main en annonçant qu’elle avait reçu un autre message des extraterrestres lui indiquant que grâce à leur foi, le monde avait été épargné. Et le groupe s’est montré encore plus convaincu et encore plus prosélyte réussissant à persuader de nouveaux adeptes de les rejoindre.
Cette étude a permis à Leon Festinger de mettre en avant l’un des premiers cas publiés de dissonance cognitive. La dissonance cognitive se produit lorsque les croyances entrent en contradiction avec les faits. Ce phénomène entraîne une tension mentale qu’il faut réduire à tout prix, quitte à réinterpréter la réalité.
 

C’est également ce qu’a constaté le journaliste Tom Bartlett en passant plusieurs heures avec des adeptes d’Harold Camping. Il a été frappé par la façon dont ces croyants ont réécrit le passé pour éviter de reconnaître qu’ils avaient été bernés, allant jusqu’à nier la prédiction du 21 mai 2011 à laquelle ils avaient pourtant donné un large écho. Apportant les preuves de ces déclarations, Tom Bartlett a constaté que les adeptes l’évoquaient comme un rêve dont ils avaient du mal à se souvenir.

(Sources : New York Magazine, 08.10.2015 & Wikipédia & UNADFI)

1- Cette analyse a fait l’objet d’un essai paru en 1956, L’Échec d’une prophétie (When Prophecy Fails)