Edgar Cabanas et Eva Illiouz, traduit de l’anglais par Frédéric Joly, Ed. Premier Parallèle, 2018
Le bonheur n’est pas dans le pré, il est partout : dans l’entreprise, à l’hôpital, dans un bidonville, sur un théâtre de guerre et jusque dans un verre de Coca Cola. Le bonheur se construit, s’enseigne et s’apprend. Il est à la portée de tout un chacun, mieux : il est du devoir de tous, question de « positive attitude ». Malheur donc à ceux qui ne souscriraient pas à cette « tyrannie du bonheur », véritable emprise que dénoncent les auteurs.
Dans cet ouvrage prenant et fort documenté, les chercheurs Edgar Cabanas et Eva Illiouz -respectivement docteur en psychologie et sociologue-, décortiquent un à un les rouages de cette pseudo-science qu’est la psychologie positive, véritable écran de fumée. À commencer par sa prétendue nouveauté.
Car, il y a quelque 120 ans déjà, le pharmacien Emile Coué résumait, en une phrase-clef, sa nouvelle méthode fondée sur l’autosuggestion : « Tous les jours, à tous points de vue, je vais de mieux en mieux ». Un mantra à répéter 20 fois le matin et 20 fois le soir, pour « conditionner l’imagination de manière favorable ».
La méthode de ce précurseur de la psychologie comportementale et de la pensée positive offrait alors deux avantages non négligeables: elle ne faisait pas de mal et ne coûtait rien.
Tel n’est pas le cas aujourd’hui, où « l’industrie du bonheur brasse des milliards d’euros », avec des résultats lucratifs pour ses promoteurs et plus qu’incertains pour les autres.