Une ex-salariée dénonce les coulisses d’un laboratoire homéopathique

Céline Masquelier a travaillé pendant 18 mois pour un laboratoire homéopathique. Diplômée de neurosciences, passée par plusieurs entreprises pharmaceutiques où elle dirigeait des essais cliniques, cette trentenaire a observé les arrière-cuisines. Elle dénonce aujourd’hui « la légèreté de l’encadrement réglementaire ».

Son embauche était liée à la stratégie de diversification de cet industriel, qui souhaitait développer une nouvelle ligne de médicaments sans rapport avec l’homéopathie. Céline Masquelier devait mettre en place des essais pour ces traitements. Cela ne s’est finalement pas fait. Et elle dit avoir découvert à quel point il était facile pour les fabricants de produits homéopathiques d’obtenir des autorisations de mise sur le marché.

« Lors du développement d’un médicament, celui-ci est testé sur des cellules et/ou des animaux en fonction de ses propriétés. S’il satisfait aux exigences réglementaires, il est autorisé à la recherche clinique. Cette recherche se découpe en trois phases. La phase I permet de déterminer si le produit est sans danger pour l’homme. La phase II vise à confirmer sa tolérance et son activité clinique. La phase III vient apporter la preuve de l’efficacité du produit, en le comparant à un placebo. C’est seulement si ce dernier résultat est positif que le médicament peut obtenir une autorisation de mise sur le marché » explique-t-elle. Mais « pour commercialiser des produits homéopathiques, les fabricants doivent juste présenter un dossier dans lequel ils montrent qu’il en existe un « usage traditionnel ». Le plus souvent, il s’agit simplement de faire référence aux écrits de l’inventeur de l’homéopathie, Samuel Hahnemann ». Selon la jeune femme, « l’homéopathie étant en perte de vitesse, leurs fabricants font des essais cliniques, dans l’espoir d’apporter la preuve que leurs produits fonctionnent. Mais les résultats de ces protocoles sont systématiquement négatifs. Les produits homéopathiques restent donc sur le marché avec l’appellation « médicament » alors qu’ils n’ont pas apporté la preuve scientifique de leur efficacité ». Pour elle, « il est temps d’arrêter de méprendre les patients. La vente en officine et l’appellation de médicament ne peuvent qu’être trompeuses. Aux États-Unis, les industriels sont obligés de mentionner que ces produits n’ont pas prouvé leur efficacité, sous peine d’être sanctionnés par la répression des fraudes. À quand cette règle en Europe ? ».

Et à ceux qui pensent qu’après tout, l’homéopathie, ce n’est que des plantes, Céline Masquelier tient à indiquer : « Il faut savoir que les souches peuvent être d’origine animale, chimique, minérale ou même humaine ». Elle cite ainsi « des poumons de cobaye, du foie de canard, de l’arsenic ou encore  le medorrhinum, préparé à partir de sécrétions purulentes de blennorragie (une infection sexuellement transmissible) et qui est indiqué pour les irritations fessières, les otites et l’asthme du nourrisson. Heureusement les hautes dilutions font qu’il n’en reste presque rien ». 

(Source : L’Express, 26.05.2024)

  • Auteur : Unadfi