La psychogénéalogie, une pseudo-science adoubée

La psychogénéalogie est une pratique développée dans les années 1970. Il s’agit de lire la maladie ou le trouble dont une personne est atteinte à l’aune des événements, traumatismes ou conflits vécus par ses ascendants. Une émission consacrée à ce thème a été rediffusée sur France Culture tout le long du mois de novembre.

L’émission « Les nuits de France Culture » a rediffusé tout le long du mois de novembre 5 épisodes (un tous les lundis) d’une série intitulée La psychogénéalogie ou l’analyse transgénérationnelle, enregistrée en 2005. La créatrice de la psychogénéalogie, Anne Ancelin Shützenberger, est une des invités.  Elle-même et d’autres intervenants dans l’émission citent des passages de la Bible qui selon eux corroborent le fait que la transmission des traumatismes est connue et évoquée depuis longtemps. Anne Ancelin cite un verset du livre de Jérémie : « Les parents ont mangé des raisins trop verts et les dents des enfants en ont été agacées ». Un autre invité, Didier Dumas, présenté comme psychanalyste et acupuncteur, cite et déclare : « ‘Je suis l’instance responsable, dit Dieu, […] du fait que les fautes des pères se transmettent sur trois ou quatre générations.’ C’est la façon même dont Dieu se présente dans les dix commandements, donc ce n’est pas rien ! »

La rediffusion de cette série d’émission intervient en même temps que la publication du rapport de la Miviludes, qui alerte sur une explosion des signalements de pratiques trompeuses et dangereuses dans le domaine de la santé. Dans son rapport de 2007, la mission alertait déjà sur la psychogénéalogie en lien avec les faux souvenirs induits.

En effet, dans le domaine du développement personnel, de nombreux pseudo-thérapeutes brandissent la psychogénéalogie pour expliquer la survenue d’une maladie et proposer des pistes de guérison. Cela s’est vu récemment, lorsque Natacha Calastrémé disait lors d’une émission sur l’endométriose que les fausses couches en général et l’endométriose en particulier consistait en un « un message de notre corps qui nous dit qu’avant, il y a eu une souffrance énorme d’une personne qui a associé le mot enfance et mort. Et enfance et mort, ça ne va pas ensemble. Il y a une culpabilité. On doit s’en libérer ».

Le succès de la psychogénéalogie est en partie dû à l’intérêt suscité récemment par les travaux dans le domaine de l’épigénétique, une discipline de la biologie. Le docteur en biologie Christophe de La Roche Saint-André explique que l’hérédité épigénétique a été étudiée et démontrée chez les plantes, chez certains vers ou chez la mouche drosophile. Il précise que « chez les mammifères en général et chez l’Homme en particulier, les données en faveur d’une hérédité épigénétique sont extrêmement limitées. Même si l’on considère deux générations successives, il faut rester prudent ». « Les fausses couches sont extrêmement répandues dans la population, ajoute-t-il, et nombreuses sont celles qui passent inaperçues. Admettons que les théories transgénérationnelles soient fondées : il faudrait pouvoir analyser toutes les ascendances et pas seulement choisir de ne tenir compte que de celles qui nous arrange. D’un point de vue scientifique, ça devient rapidement indémêlable. »

(Source : marianne.net, 09.11.2022)

  • Auteur : Unadfi