La nomination de Patrick Hetzel à la tête du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche suscite l’inquiétude des chercheurs. Et pour cause. Le député alsacien LR s’est à plusieurs reprises distingué par ses positions complotistes.
C’est pendant la crise sanitaire que l’ancien député a commencé à se faire remarquer. Il a ouvertement défendu le traitement promu par le professeur Raoult et a envoyé un courrier au président de la République pour lui demander de laisser les médecins généralistes prescrire de l’hydroxychloroquine à leurs patients. A ce moment-là, une large part de la communauté scientifique avait pourtant déjà fait part de ses inquiétudes à propos du manque de preuves de l’efficacité de ce médicament contre le nouveau virus. Patrick Hetzel, lui, avait signé la pétition en faveur de l’hydroxychloroquine initiée par Philippe Douste-Blazy et cosignée, entre autres, par les médecins complotistes Christian Perronne et Martine Wonner… Depuis, l’inefficacité, et même la dangerosité du remède du Pr Raoult, ont été largement prouvées. Mais le nouveau ministre de la Recherche, ancien professeur d’université, spécialisé en gestion, persiste. Il a tenu par la suite des positions étonnantes à propos des vaccins anti-Covid. Il a par exemple interpellé Olivier Véran (à l’époque ministre de la Santé) à deux reprises en juillet 2021, pour dénoncer le choix du gouvernement de rendre obligatoire un pass vaccinal. Il s’était aussi ému de l’obligation du port du masque à l’école.
Opposé à la loi contre les dérives sectaires
Et en fouillant dans les diverses interventions parlementaires, questions au gouvernement, amendements, ou pages de blogs de l’ex-député, plusieurs observateurs ont découvert que Patrick Hetzel a défendu des positions contraires à la science, mais aussi à l’intérêt des patients, sur de nombreux sujets, et ce bien au-delà de la seule crise sanitaire.
En novembre 2020, il a ainsi cosigné une proposition de loi visant à instaurer un moratoire de deux ans sur le taux de remboursement de l’homéopathie… Etonnant alors que l’inefficacité de l’homéopathie, largement démontrée, ne faisait alors plus débat dans la communauté scientifique.
En 2020 toujours, Patrick Hetzel a aussi cosigné une proposition pour un plan national visant à mieux prendre en charge la maladie de Lyme chronique dans notre pays. Problème : si l’infection aiguë par la borréliose de Lyme est bien reconnue, sa version chronique reste controversée. Elle serait l’invention de « lyme doctors » qui prescrivent des traitements non démontrés.
Le soutien de l’élu alsacien aux pseudo-thérapies semble donc relever de convictions bien ancrées. A la même période, il s’est d’ailleurs encore distingué en cosignant un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale visant, entre les lignes, à légitimer des pratiques thérapeutiques alternatives n’ayant pas fait la preuve de leur efficacité. Or, la diffusion des thérapies alternatives est dénoncée par une large part du corps médical, mais aussi par la Miviludes qui ne cessent d’alerter sur les dangers de ces pratiques (dérives thérapeutiques, perte de chances en cas de pathologie avérée, risque de mise sous emprise, dépenses inutiles et souvent conséquentes)… Sûrement pas très important pour le futur ministre qui, en 2023, faisait partie des parlementaires qui se sont opposés à la loi contre les dérives sectaires.
(Source : L’Express, 23.09.2024)