Dérives à foison au festival de Sisteron

Le festival Les Foisonnantes, programmé les 12 et 13 octobre 2024, se présente comme un événement alternatif axé sur l’éducation et le bien-être. Des syndicats et collectifs antifascistes dénoncent, derrière cette vitrine, une infiltration de l’extrême droite, de mouvements conspirationnistes et de dérives sectaires.

Ce mois d’octobre, Sisteron était le théâtre d’une nouvelle édition du festival Les Foisonnantes. À première vue, l’événement semble inoffensif, se voulant un rassemblement autour de l’éducation des enfants, du bien-être et de la santé naturelle. Reste que la présence d’intervenants controversés laisse à penser que l’événement n’est pas si anodin que cela.

La première édition, qui s’est tenue en 2023 aux Mées, avait déjà fait l’objet de vives critiques. Parrainée par le professeur Christian Perronne, célèbre pour ses positions dénialistes lors de la pandémie de Covid-19, le festival avait été pointé du doigt. Le maire PCF des Mées, Frédéric Puech, une fois informé du contenu de la manifestation, avait d’ailleurs pris ses distances avec les organisateurs et exprimé son inquiétude à la vue de la liste des participants qu’il a jugés « en parfaite contradiction avec les valeurs de la commune ».

Parmi les personnalités invitées cette année encore, beaucoup sont issues de la mouvance Réinfocovid, un collectif dirigé par Louis Fouché, un ancien médecin controversé, qui s’est illustré pendant la pandémie avec des discours complotistes. Fouché et ses partisans prônent un rejet des vaccins, des institutions publiques, et un retour à une santé prétendument plus « naturelle ». Mais derrière ce discours se cache un soutien politique explicite à des figures d’extrême droite, comme Marine Le Pen. Pour rappel, quinze des seize membres du Conseil de Réinfocovid ont appelé à voter pour la candidate RN au second tour de l’élection présidentielle.

Daniel Spagnou, maire de Sisteron, soutient, lui, ouvertement Les Foisonnantes. Pas étonnant pour certains observateurs qui rappellent « ses prises de position en ligne relayant des contenus anti-immigration, anti-islamisation, et des publications pro-russes et pro-Trump ». Mais on peut s’interroger quant aux véritables intentions de l’événement.

La liste des intervenants a en effet de quoi faire réagir. On retrouve des visages bien connus de la mouvance complotiste. Fabien Moine et Marie Grenet, membres actifs de Réinfocovid, figureront notamment parmi les conférenciers. A l’affiche également : le Respirien Jacques Antonin (qui prétend qu’on peut vivre sans boire et sans manger), Joëlle Richardière (disciple de l’anthroposophie), Jacques Besson (qui affirme, entre autres, qu’on peut discuter avec ses ancêtres décédés et qui prône une pédagogie curative pour les enfants atteints de troubles autistiques), Valérie Bugault (juriste qui défend la Charte des valeurs intangibles de la France et qui intervient régulièrement dans des événements du groupuscule Civitas) ou encore Stéphane Bence (animateur d’ateliers de yoga Heartfulness).

Si l’on creuse un peu, Les Foisonnantes semblent être davantage un cheval de Troie pour des idées radicales qu’un rassemblement bienveillant. « Le mélange de théories pseudo-scientifiques et de positions politiques réactionnaires crée un terreau propice à la désinformation et aux dérives sectaires » ont dénoncé, dans un courrier adressé au maire, les syndicats FSU, SUD Éducation, SGEN-CFDT et Unsa Education. Pour eux, les Foisonnantes masquent en réalité une infiltration insidieuse de l’extrême droite et des mouvances complotistes. Estimant que la vigilance est de mise, ils avaient demandé à l’édile d’annuler l’événement organisé dans une salle municipale. Mais ils s’étaient vus opposer une fin de non recevoir. Interrogés, les organisateurs semblent botter en touche se contentant de dire que le festival n’est « ni de droite, ni de gauche ». Ils réfutent toute dérive sectaire et soulignent que « ce qui est important, c’est le message, pas le messager »…  

(Sources : L’Extracteur, 29.09.2024 & Libération, 11.10.2024)

  • Auteur : Unadfi