Canada / Dans l’intérêt des enfants

À Hamilton, le 19 janvier 2015, Makayla est décédée d’une leucémie à l’âge de 11 ans. Malgré l’assurance que ses chances de survie étaient de 90 à 95%, un juge avait autorisé ses parents amérindiens à la soustraire à son programme de soins chimiothérapiques salvateur pour lui administrer des traitements alternatifs ancestraux.

Traitée pour un cancer du sang à l’hôpital McMaster de Hamilton, ses médecins avaient alerté la Cour supérieure de l’Ontario pour pouvoir continuer le traitement. Mais les preuves médicales convaincantes qu’ils ont apportées n’ont pas pesé dans la balance du juge Gethin Edward qui, lors d’un « jugement scandaleux », « a inventé un droit constitutionnel des parents à refuser des traitements médicaux pour leur enfant ».

Les défenseurs des parents de Makayla ont établi leur défense sur l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 qui dispose que « les droits existants – ancestraux ou issus de traités – des peuples autochtones du Canada sont reconnus et confirmés ». La conclusion du juge est d’autant plus révoltante qu’elle a été prononcée en dépit des progrès de la médecine et que le droit à la vie de cet enfant n’a pas été discuté alors qu’il est garanti par cette même Constitution. La question n’est pas de remettre en question le respect des coutumes et traités ancestraux mais de faire prévaloir la vie des enfants quand elle est menacée.

Pourtant, concernant les Témoins de Jéhovah et leur refus de transfusions sanguines, les tribunaux tranchent systématiquement en faveur du droit à la vie de l’enfant. Ils partent du principe qu’un adulte peut refuser un traitement s’il le souhaite mais ne peut pas imposer ses choix à ses enfants, « même au nom de la religion ».

L’ironie veut que les traitements ancestraux administrés à l’enfant l’aient été dans un centre holistique, nullement autochtone, l’Institut Hippocrate Santé à West Palm Beach, en Floride. Ses dirigeants croient que la guérison du cancer passe par la « positive attitude » ainsi qu’un régime alimentaire strict à base de plantes « bio » et la suppression de tout contaminant.

Mélanie Dugré, avocate, évoque le cas similaire de J. J. Elle estime que les décisions de la justice concernant ces deux affaires « ont eu l’effet pervers de créer deux catégories d’enfants dont les droits varient en fonction de leurs origines ». Ces jugements sont également énonciateurs « d’éventuels dérapages puisque la frontière entre l’autonomie culturelle des Amérindiens et la liberté de religion des adeptes de sectes et autres mouvements religieux occultes est bien mince ». Si le choix des parents doit être respecté, ça ne doit jamais être au détriment de l’enfant.

(Sources : Droit INC, 10.12.2014 & La Presse, Yves Boisvert, 22.01.2015)