La santé visée par les sectes

Revenant sur le dernier rapport de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes)paru en mars 2018, qui alertait sur les dérives sectaires « associées aux médecines alternatives », plusieurs journaux constatant l’essor de pratiques non reconnues et mettent en garde contre les risques .

Le domaine de la santé concentre près de la moitié des cas soumis à la Miviludes. En effet, en constante augmentation, les signalements reçus par cet organisme sont passés de 40 % en 2014 à 46 % en 2016. Rien que pour l’année 2016, cela représentait près de 1500 saisines.

Profitant d’un public en recherche de bien-être, les Pratiques Non Conventionnelles à Visées Thérapeutiques(PNCAVT) connaissent un énorme essor. Mais parfois les conséquences pour leurs adeptes sont dramatiques. Le rapport relate l’histoire de Cerise*, une jeune femme restée six ans sous l’emprise d’une thérapeute. Sous antidépresseurs suite à une rupture amoureuse, des amis lui recommandent une thérapeute pour l’aider à arrêter son traitement. Sous l’influence de celle-ci, elle aura recours à diverses techniques, telles que le reiki, la kinésiologie, la sophrologie, la reprogrammation de l’ADN, la communication avec les esprits qui lui feront débourser beaucoup d’argent sans aucun résultat ; elle ira jusqu’à rompre tout lien avec son entourage. Sortie de l’emprise grâce à sa mère, elle a mis plusieurs années à se reconstruire.

Les formations et les diplômes pour ces pseudo -thérapies, n’étant pas reconnus par l’État, n’importe qui peut se déclarer « maître reiki », kinésiologue, ou autre, et enseigner ces techniques. Un amateurisme qui peut avoir des conséquences dramatiques, comme ce fut le cas pour Jacqueline Starck. Atteinte d’un cancer, elle s’est tournée vers la Biologie totale et pendant un an et demi n’a eu recourt qu’à cette pseudo-thérapie. Lorsque la douleur devenue insupportable l’a contrainte à se rendre à l’hôpital, il était trop tard. Elle est décédée peu de temps après.

L’offre pléthorique de techniques a amené le journal Vice à se pencher sur un certain nombre d’entre elles, dont celle qui a coûté la vie à Jacqueline Starck, la Biologie Totale. Dérivée de la Médecine nouvelle germanique inventée par Ryke Geerd Hamer, cette méthode prétend que les maladies « sont causées par un conflit ou un choc psychologique » qui finit par « atteindre l’organe relié à la partie du cerveau concernée ». Le malade doit donc pouvoir se soigner lui-même et s’il échoue, il est seul à en porter la responsabilité. Non-seulement culpabilisatrice, cette méthode peut se révéler très dangereuse lorsque les patients atteints de pathologies lourdes abandonnent toute autre traitement. Le journal rappelle que « Hamer a été condamné en 2004 à trois ans de prison ferme pour escroquerie et complicité d’exercice illégal de la médecine ».

D’autres méthodes issues de ce courant sont aussi à éviter, telles que le Décodage biologique ou la Psycho-bio-thérapie, par exemple.

Autres méthodes explorées par le journal, celles en rapport avec l’alimentation et leurs bienfaits pour la santé. Si des thérapies basées sur l’alimentation pourraient ne pas paraitre dangereuses, certains régimes proposés par des guérisseurs peuvent s’avérer problématiques par de possibles carences. Le journal évoque l’instinctothérapie, qui « recommande de se limiter à une consommation d’aliments crus sélectionnés à l’instinct ». Comme le rappelle Serge Blisko, « aucun régime ne peut s’appliquer à tous », et la recherche sur la nutrition n’en est qu’à ses débuts.

Plus radical en termes de régime alimentaire, le respirianisme, qui prône l’arrêt de toute alimentation pour se nourrir de prana, une « énergie fondamentale présente dans l’air ».

Autre méthode qui a attiré l’attention du journaliste de Vice, l’amaroli qui se propose de soigner en ingérant sa propre urine.

Enfin, Vice attire l’attention de ses lecteurs sur le développement du « psycho-tourisme » et en particulier le néo-chamanisme qui amène un public de plus en plus nombreux au Pérou pour ingérer de l’ayahuasca, une substance psycho-active, censée traiter des problèmes psychologiques ou d’addiction aux drogues. Mais Serge Blisko prévient, « nous avons constaté un risque de problèmes psychiatriques lourds, suite à ces expériences. Notamment des cas de suicide et de décompensation psychiatrique ».

(Sources : 66 Millions d’impatients, 31.05.2018 & Vice 01.06.2018)

* Le prénom a été modifié