Le 27 février 2019, la cour supérieure du Québec a autorisé une action collective contre deux organisations liées aux Témoins de Jéhovah en Amérique du Nord, la Watch Tower Bible and Tract Society of Canada et la Watch Tower Bible and Tract Society of Pennsylvania. L’action collective porte sur des accusations d’agressions sexuelles.
Lisa Blais est une ex-adepte issue d’une famille membre des Témoins de Jéhovah. Mineure, elle a subi des agressions sexuelles de la part de son frère ainé. Après s’être plaint auprès de sa famille, de membres et de dirigeants de la congrégation, tous l’ont dissuadée de dénoncer les faits afin de ne pas ternir l’image de Jéhovah et de protéger la communauté. A 17 ans elle a quitté sa famille avant d’être renvoyée du mouvement en 1996 à l’âge de 24 ans. Elle est l’auteur de la requête demandant au tribunal de l’autoriser à exercer une action collective. Elle souhaite ainsi donner accès à la justice aux autres membres abusés. Elle espère que d’autres victimes se manifesteront.
L’action collective sera instituée au nom de deux groupes d’individus : ceux témoignant avoir été agressés sexuellement par un ancien et ceux relatant des faits similaires commis par des membres du groupe alors qu’ils étaient mineurs. Elle visera la Watch Tower Bible and Tract Society of Canada (maison mère des Témoins de Jéhovah au Canada) et la Watch Tower Bible and Tract Society of Pennsylvania (société qui s’occupe de la communication et des publications du groupe).
Dans sa décision d’autoriser le recours collectif, la juge Chantal Corniveau soutient que la nature d’une telle action n’est pas de faire le procès des croyances jéhovistes mais bien de remettre en question l’organisation du mouvement, sa structure hiérarchisée et patriarcale ainsi que sa culture du silence. Ce recours collectif soutient en effet que les politiques internes en matière de signalement des abus ont fait taire des centaines de plaintes pour agression sexuelle.
Lisa Blais et les autres membres de l’action collective réclament au moins 250 000 $ en dommages-intérêts pour chaque victime présumée. Selon les avocates pilotant le recours, les victimes pourraient se compter par centaines.
Les avocats plaidant contre le recours collectif ont soutenu que le tribunal n’avait pas à intervenir dans les pratiques religieuses. La juge Chantal Corniveau a statué le contraire prétendant que les allégations étaient basées sur un ensemble de faits fondés.
Ils ont aussi soutenu que les accusations de Lisa Blais étaient trop vagues, que ses blessures provenaient de l’inceste et que ses parents ne l’avaient pas protégée. Selon un porte-parole de l’organisation, si cette affaire est jugée, elle montrera que les Témoins de Jéhovah dénoncent les abus aux autorités conformément à la loi. Pour lui, le bien-être des enfants serait de la plus haute importance pour les Témoins de Jéhovah.
La Watch Tower Bible and Tract Society of Canada envisage de faire appel de cette décision.
(Sources : Montréal Gazette, 04.03.2019 & La Presse, 05.03.2019 & Le Journal de Montréal, 05.03.2018 & La Croix, 07.03.2019)