« Un discours apocalyptique exponentiel »

Le discours apocalyptique des Témoins de Jéhovah trouve un écho particulier en cette période de pandémie. Non seulement le Collège central y voit l’aboutissement de ses prophéties moult fois annoncées, mais aussi l’occasion de resserrer ses rangs, en impliquant ses fidèles dans une campagne mondiale de prosélytisme dont l’objectif est double : recruter de nouveaux membres, mais également ramener dans le giron de l’organisation les « refroidis », c’est-à-dire ceux qui s’en sont éloignés.

Sur leur site internet ils préviennent : « Les événements que nous vivons montrent plus que jamais que nous vivons la fin des derniers jours ». Selon Daniel, un Témoin de Jéhovah resté dans le groupe pour ne pas perdre ses proches, l’organisation « doit continuer d’occuper ses membres ».

Devant l’impossibilité de tenir des stands dans la rue et de faire du porte à porte, l’organisation a confié aux adeptes la mission de contacter un maximum de gens par téléphone pour leur présenter le mouvement.

Mais comme ce travail n’est pas très efficace pour recruter de nouveaux adeptes, ils sont également incités à démarcher leurs relations de travail, leur famille, mais également ceux qui ont quitté le mouvement.

« Dès qu’ils ont un évènement un peu extraordinaire, ils s’en saisissent pour attiser cette peur latente, cette épée de Damoclès de la fin de monde », explique Daniel. Car la crainte de l’apocalypse reste bien présente, même chez ceux qui ont quitté le groupe depuis plusieurs années.

La stratégie semble fonctionner. Charline Delporte, la présidente du Centre national d’accompagnement familial face à l’emprise sectaire (Caffes) a noté une nette recrudescence des appels concernant les Témoins de Jéhovah (l’augmentation serait de 20% ces derniers mois). Elle cite l’exemple d’une femme qui a quitté son mari d’origine tunisienne pour rejoindre le groupe avec leur fille de neuf ans, ou encore le cas d’un jeune homme qui avait quitté le groupe depuis dix ans, à cause de son homosexualité. Recontacté récemment par sa famille, qui lui avait pourtant tourné le dos, il est retourné dans la communauté.

Si l’organisation profite de la crise sanitaire pour recruter, elle met aussi à profit la peur de la fin du monde pour pousser ses adeptes à être encore plus assidus dans leur pratique, en  les culpabilisant. La direction du mouvement les exhorte, verset biblique à l’appui, à prêcher pour sauver « leurs contemporains de la colère de Dieu lors de la fin du monde imminente ».

En dehors de ces activités visant à ramener les brebis égarées, le mois de novembre a aussi vu le lancement d’une campagne mondiale visant à redorer l’image du mouvement. Un communiqué1 l’Union nationale des associations de défense des familles et de l’individu victimes de sectes (Unadfi) alerte sur cette campagne, expliquant que les Témoins de Jéhovah sont sollicités par la Watchtower pour « adresser un courrier si possible manuscrit à toutes les autorités (élus, commerçants, professionnels), pour leur présenter la Tour de Garde « Qu’est-ce que le Royaume de Dieu ? ». « Le fait que la lettre soit manuscrite pourrait faire croire qu’il s’agit d’une démarche personnelle d’un particulier alors que tout est orchestré par l’Organisation mondiale, le modèle de lettre ayant été adressé aux assemblées locales de tous les pays. » prévient l’Unadfi.

L’association rappelle que « cette opération marketing se déroule alors que plusieurs enquêtes sont menées par des autorités de différents pays suite aux dénonciations de nombreux ex-Témoins de Jéhovah concernant des atteintes à la dignité dont ils ont été les victimes.
»

(Sources Le Figaro, 23.11.2020 & Communiqué de l’Unadfi, 19.11.2020)

1- Lire le communiqué de l’Unadfi : Un lobbying mondial dicté par l’Organisation des Témoins de Jéhovah : https://www.unadfi.org/actualites-et-communiques-de-lunadfi/communique-de-presse-du-19-11-2020/

  • Auteur : Unadfi