A une époque où paraissaient d’innombrables articles sur le programme « MK-Ultra »1 mené par la CIA dans les années 1950-1960, un court entrefilet paru dans le Washington Post du 13 janvier 1979, révélait que la CIA aurait envisagé d’utiliser des médicaments, des traitements de chocs, voire l’ablation de parties du cerveau pour se débarrasser d’agents devenus gênants.
L’auteur de ce scoop, « Citoyens américains pour l’honnêteté du gouvernement », n’est autre qu’une émanation de la Scientologie qui était à l’époque en guerre ouverte contre la CIA. Profitant du Freedom information act et usant de nombreuses poursuites judiciaires contre l’Etat, l’organisation a réussi à obtenir des documents sensibles qu’elle a ensuite publiés pour discréditer le gouvernement.
Mais l’organisation Citoyens américains pour l’honnêteté du gouvernement ne s’est pas contentée de divulguer ces documents, elle a publié d’autres articles. L’un expliquait que des expériences de contrôle mental menées sur des sujets en état hypnotique avaient mal tourné, provoquant chez ces derniers des impulsions violentes incontrôlables. Un autre révélait que la CIA aurait créé des armes visant à soumettre les agents ennemis grâce à un choc électrique. L’organisme scientologue a également publié des annonces pour retrouver des personnes soit-disant utilisées comme cobayes par l’armée pour tester des drogues hallucinogènes. En décembre 1979, une nouvelle histoire paraît dans The Post accusant cette fois la CIA d’avoir propagé dans les années 1950 la bactérie de la coqueluche en Floride, provoquant ainsi le décès de 12 personnes. Pour ce dernier cas, la réponse de la CIA ne se fait pas attendre : l’obtention de tels documents par la Scientologie était possible car tous les fichiers sur des tests chimiques avaient été détruits en 1973.
Pourquoi un tel acharnement de la Scientologie contre les agences d’Etat américaines ? Tout simplement parce que ces dernières se sont intéressées de trop près à elle.
En 1977, les locaux de Los Angeles et Washington de la Scientologie sont perquisitionnés par des agents fédéraux. Le groupe est accusé d’avoir cambriolé des bureaux de l’Internal Revenue Service (IRS)2, du procureur de Washington et du ministère de la justice pour y voler des documents la concernant. Un article du Post révèle que des agents du gouvernement ont découvert des dossiers sur cinq juges fédéraux, mais aussi sur des personnalités politiques et sur l’American Medical Association. Certains des dossiers portaient des noms dignes du contre-espionnage : Eyes only, Operation Big Mouth… la secte conservait également des documents secrets de la CIA et de l’IRS.
Suite à ces découvertes, onze responsables du groupe, dont l’épouse de Ron Hubbard, furent inculpés pour complot présumé visant à espionner le gouvernement. Jugés dans la foulée, neuf furent condamnés à des peines de quatre à cinq ans de prison. Ayant fait appel ils sont tous restés libres en attendant le verdict.
En 1980, deux scientologues furent extradés d’Angleterre pour les mêmes motifs et furent, eux aussi, condamnés.
Depuis sa fondation, la Scientologie est coutumière de ce genre de pratique envers ceux qui regardent de trop près ses activités : FBI, médias et plus récemment le collectifs Anonymous.
(Source : Washington Post, 05.03.2019)
1. La CIA aurait mené des expériences de contrôle mental en utilisant des drogues. Sur des citoyens dans les années 1950-1960.
2. Agence du gouvernement fédéral américain qui collecte les impôts.