En 1936, à la suite d’une expérience spirituelle intense, (une vision de destruction du monde et un contact direct avec le dieu Shiva l’Ame Suprême) Lekh Raj Kripalani, un riche diamantaire indien, fonda le mouvement des Brahma Kumaris (BK). Appelé Brahma Baba par ses adeptes, Dada Lekh Raj continua à recevoir la « connaissance » de Shiva et à en retransmettre les murlis (messages) à ses adeptes. Il confia l’organisation du mouvement à un groupe de 9 femmes.
Depuis sa mort en 1969, deux d’entre elles, Dadi Prakashmani (« Joyaux Suprêmes ») et Dadi Janki, sont les véritables dirigeantes de cette organisation dénommée Université Spirituelle Mondiale des Brahma Kumaris (BKWSU). Elles disent continuer à recevoir des « murlis » de Baba, mais ses instructions secrètes ne sont en principe accessibles qu’aux membres les plus avancés spirituellement.
– Les croyances, dérivées de l’hindouisme, en diffèrent sur de nombreux points ne serait-ce que par l’interprétation des concepts de réincarnation et de karma. Elles reposent, par ailleurs, sur le channelling et la capacité de modifier l’environnement par la pensée (qui font plutôt penser à la Théosophie et au Nouvel Age) ; elles prétendent expliquer globalement l’univers matériel et immatériel et mettre en équation l’énergie et la conscience. Identifié comme apocalyptique, le mouvement annonce la destruction imminente du monde, suivie d’un Age d’or (Sat yuga) pour les BK, l’élite spirituelle : le monde physique, qui suit un cycle répétitif de 5000 ans, est actuellement à la fin d’un de ces cycles.
– Les pratiques quotidiennes des membres sont le détachement (du corps et des émotions), le végétarisme, la purification sous toutes ses formes (corporelle, pensées négatives), la soumission et la méditation par le « Raja Yoga ». Par sa pratique et par son encadrement, le détachement incite le dévot à tout quitter, ses avoirs, son confort, ses amis et ses attaches sentimentales (afin d’avoir l’esprit libre pour naître spirituellement). La pureté devient une obsession pour faire partie de la communauté des déités (le reste des humains étant la communauté démoniaque), la méditation cinq minutes par heure a pour but d’être réceptif à un message spirituel que Baba pourrait leur envoyer. La coupure du monde extérieur, la fatigue, l’obéissance et la soumission conduisent à la perte de l’esprit critique et du sens des responsabilités.
– Le siège mondial de la BKWSU est situé au nord de l’Inde (Mont Abu, Rajasthan). Il comporte une académie « pour un Monde meilleur » (avec un campus, un auditorium de 1600 places, 14 salles de séminaires), un hôpital « du futur » de 120 lits dont les services allient médecine moderne et traditionnelle (inauguré en 1991 par le ministre indien de la santé), une école primaire, et la fondation Janki pour financer divers programmes humanitaires. Son développement international passe par les centres Raja Yoga-méditation-BK dont le bureau de coordination est basé à Londres. Les BK revendiquent aujourd’hui près d’un million d’étudiants dans plus de 7000 centres et 90 pays.
En France, une vingtaine de centres de raja yoga ont un statut d’association Loi 1901 sans but lucratif. Ces centres proposent des cours et des ateliers de méditation ; les plus importants organisent des conférences et des rencontres sur des thèmes philosophiques comme les valeurs dans l’entreprise ou dans la publicité, médecine et spiritualité, femmes et spiritualité, etc. Des représentants des religions y sont régulièrement invités.
On ne peut qu’être frappé par l’incroyable décalage qui existe entre les textes destinés aux membres de la communauté et ceux qui s’adressent à un plus large public, entre la réalité de la vie des membres et la façade qu’offre le mouvement. Car, à l’extérieur, la BKWSU se présente comme un nouveau mouvement religieux reprenant les « valeurs morales et spirituelles les plus élevées de l’humanité ».
D’après le site internet du mouvement, ses nombreux manifestes et autres publications, on imagine un groupe de pensée humaniste, apolitique, oecuménique, préoccupé par les convulsions de la terre et proposant des cadres de réflexion sur des thèmes aussi consensuels que la paix dans le monde, la coopération globale pour un monde meilleur, etc. Des personnalités comme Mère Térésa, le Dalaï Lama ou le Pape lui ont permis d’acquérir une certaine respectabilité. Des initiatives louables lui ont valu d’être reconnu et apprécié par l’UNICEF, et par l’ONU qui a décerné à la BKWSU le titre envié de « Messager de la Paix ». Aujourd’hui, cependant elle ne bénéficie plus du même crédit à l’ONU, pour en avoir utilisé le logo abusivement. Et beaucoup d’anciens membres dénoncent les dérives du pouvoir absolu des dirigeantes.