Prédateurs d’adolescentes dans la secte d’Osho

Lily Dunn, une Britannique de 49 ans, raconte dans son livre Sins of My Father : A Daughter, a Cult, a Wild Unravelling (Les péchés de mon père : une fille, une secte, un dénouement brutal), publié le 17 mars 2022, l’impact qu’eut sur elle et sur sa famille le départ de son père du foyer familial lorsqu’elle était enfant.

Jusqu’à ses six ans, Lily Dunn a vécu une enfance tout à fait normale, entourée de son père, sa mère et son grand frère. Puis un jour son père partit vivre dans un ashram situé à Pune, en Inde, pour y suivre les enseignements du gourou Indien Osho. Lily Dunn publie aujourd’hui un livre relatant le traumatisme provoqué par ce départ soudain et par le retour six mois plus tard d’un père devenu méconnaissable : amaigri, bronzé, arborant une longue barbe, se faisait désormais prénommer Purvodaya.  Il avait subi une vasectomie, opération qu’Osho incitait ses disciples à se faire, et était accompagné de sa nouvelle petite amie. Sa femme demanda le divorce immédiatement. Le père de Lily Dunn n’était plus la personne qu’il avait été : un Britannique éduqué, faisant partie de la petite bourgeoisie, travaillant dans le domaine de l’édition, marié et père de deux enfants. Il fit partie de cette vague d’Européens et d’Américains qui, dans les années soixante et soixante-dix, cherchaient à fuir la banalité du quotidien et à vivre sur la base d’une grande liberté, notamment en termes de mœurs. Et c’est là l’origine de l’autre blessure que Lily Dunn tente de guérir avec son livre : celle engendrée par un grand sentiment de vulnérabilité lorsque, dans sa jeune adolescence, elle rendait visite à son père, alors que celui-ci résidait dans les différents centres de la secte en Europe. Au sein de ces communautés, la pratique du « sexe libre » préconisée par Osho s’étendait également aux jeunes adolescentes ayant tout juste atteint la puberté. Le gourou affirmait en effet que les jeunes filles pouvaient être « guidées » dans le début de leur vie sexuelle par des hommes plus âgés. Si Lily Dunn précise n’avoir jamais été victime ni de viol ni d’attouchements, elle sait que d’autres l’ont été. La concernant il s’est surtout agi d’échanges et de rapports dérangeants et ambigus avec des hommes. Elle a grandement souffert du manque de protection de la part de son père et de son absence totale de lucidité quant à la situation. Elle se rappelle notamment un séjour dans un centre à Toscan, lors duquel un homme de 38 ans confia à son père vouloir « faire l’amour avec elle ». Lily Dunn entendit son père dire qu’elle « pourrait apprendre des choses » de cet homme « bon ». Elle avait alors 13 ans. Elle choisit à l’époque de ne rien confier de tout cela à sa mère, par peur qu’on lui interdise de voir son père, qu’elle aimait malgré tout. La mère, elle, n’envoyait pas de bon cœur sa fille dans ces centres. Néanmoins elle souhaitait éviter qu’un éloignement trop important entre sa fille et son ex-mari ne confère à ce dernier une mystérieuse aura messianique.

Dans les années 2000 le père dut faire face à des problèmes financiers qui le plongèrent dans l’alcool. Il décéda en 2007 dans des circonstances peu glorieuses. Sa fille entreprit alors de suivre une thérapie. Trois années de suivi et la rédaction de son livre l’ont aidée à faire le deuil de ce père dont elle garde un souvenir tendre. Néanmoins, d’autres témoignages préoccupants – des livres comme celui de Lily Dunn, un documentaire, des articles dans la presse – commencent à parvenir au public. Comme le cas de cette femme qui vivait dans un des centres d’Osho lorsqu’elle était adolescente : harcelée par des hommes qui souhaitaient avoir une relation sexuelle avec elle, elle travaillait 14 heures par jour, sans possibilité d’être scolarisée.

« Ce qui ressort en premier lieu » de ces témoignages, commente Lily Dunn, « est l’existence généralisée et systémique de négligence à l’égard des enfants et d’abus sexuels. » 

(Source : The Telegraph, 10.04.2022)

  • Auteur : Unadfi