En réaction à l’achat par la Scientologie, pour 33 millions d’euros, d’un bâtiment à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis)1, Libération a publié un dossier analysant les tenants et les aboutissants de cet achat et fait un point sur l’état du mouvement.
Les journalistes de Libération ont pu se procurer les plans d’architectes du bâtiment en question. Situé à proximité du stade de France et visible depuis l’autoroute A1, cet imposant immeuble devrait entre autre abriter un auditorium de 720 places, des salles de formation, des saunas ou encore une réplique du bureau du fondateur du mouvement Ron Hubbard. Les travaux envisagés prouvent l’important pouvoir financier de la Scientologie. En effet, elle a fait appel à une agence d’architecture et un cabinet de conseil en construction mondialement reconnus. L’immeuble constituera le siège français du groupe. Les scientologues revendiquent 40 000 membres en France, mais ce chiffre est démenti par un ancien adepte selon lequel ils seraient à peine 400.
C’est une société écran, la SCI Building Investment, qui a acheté l’immeuble au propriétaire précédent. Aucune mention de la Scientologie dans la promesse de vente mais une clause de confidentialité qui garantit le secret quant à l’identité de l’utilisateur. La mention de l’exploitation du bâtiment par le groupe n’a été ajoutée que lors de la remise aux pouvoirs publics des documents officiels concernant la transaction.
Les pouvoirs publics ont alors entamé un combat avec le mouvement et envisagent de préempter le bâtiment. Cependant la mairie doit prévoir un projet de remplacement sinon elle s’expose à être condamnée pour pratique discriminatoire. Les avocats de la Scientologie suivent attentivement ce dossier. Ils n’ont d’ailleurs pas hésité à envoyer une lettre à la municipalité lui reprochant de ralentir la transaction et la menaçant d’un procès. Prise en étau, la municipalité a sollicité le soutien de l’État qui pour l’instant n’a pas donné suite à ses demandes. Le 19 mars 2019, Stéphane Peu, député communiste a même déposé une question écrite à l’Assemblée Nationale (Question n°18210), adressée à Bruno Le Maire, ministre de l’économie. Le député demande l’annulation de la vente et le lancement de poursuites contre l’entité qui a vendu le bien à la Scientologie.
Libération a pointé la perte de vitesse que connait actuellement la Scientologie, les témoignages récents d’anciens adeptes et des documentaires2 ayant entaché son image. Malgré ces critiques, certaines célébrités influentes dont Tom Cruise continuent d’utiliser leur notoriété pour faire la promotion du mouvement auprès des chefs d’états. Pour remédier, à son déclin la Scientologie investit dans l’immobilier à travers le monde et ouvre un grand nombre d’org ideal [sorte de complexe multiservices pour les adeptes]. Cependant une fois leur inauguration passée, ces bâtiments semblent rester vides. Ils n’auraient pour but que de montrer aux adeptes du monde entier le bon fonctionnement et la prospérité du mouvement. Pour Jeffrey Augustine3, ex-adepte, ces investissements permettent aussi à la Scientologie de dépenser son argent et d’éviter d’accumuler un capital trop important qui pourrait alerter le fisc. Ces actifs immobiliers sont estimés à 3,5 milliards de dollars.
Pour les journalistes auteurs de cette enquête, le manque d’intérêt des pouvoirs publics pour le dossier sectaire et la baisse des subventions aux associations s’en préoccupant sont des éléments qui auraient facilité l’implantation de la Scientologie.
(Sources : Libération, 18.04.2019 & Europe 1, 19.04.2019)
1. Lire sur le site de l’UNADFI, La Scientologie prend racine en région parisienne : https://www.unadfi.org/groupes-et-mouvances/la-scientologie-prend-racine-en-region-parisienne/
2. Lire sur le site de l’UNADFI :
– Une série-documentaire contre la Scientologie : https://www.unadfi.org/groupes-et-mouvances/une-serie-documentaire-contre-la-scientologie/
– Etats-Unis / Going clear : https://www.unadfi.org/groupes-et-mouvances/etats-unis-going-clear/
3. Son site : https://scientologymoneyproject.com/