Myriam est née dans une communauté juive ultra-orthodoxe basée dans un quartier résidentiel de la banlieue nord de Londres. Après une vie marquée par la servitude et les interdictions et malgré le rejet de sa famille, les intimidations et les accusations diffamatoires dont elle fait l’objet, elle a trouvé la force et les moyens de fuir. Son histoire a mis en lumière l’une des communautés les plus recluses du Royaume-Uni.
Mariée sous la contrainte, sa vie de couple, de famille et son quotidien étaient entièrement contrôlés par les rabbins de la communauté. Des règles lui imposaient ses lectures, sa façon de s’alimenter, d’avoir des relations sexuelles, de s’habiller1. Très tôt on lui a enseigné qu’elle devait porter des robes longues et des collants épais. Si la femme ne fait pas preuve de modestie et de sobriété, elle met l’homme en danger en les poussant au péché.
Sa rébellion a démarré après avoir obtenu l’autorisation de se rendre à la bibliothèque locale où elle a pu approcher les ouvrages qui lui étaient interdits. Plus jeune, elle avait demandé la permission à ses parents de prendre des cours. Ils lui ont répondu qu’elle devrait les financer elle-même, tout en lui interdisant de travailler.
Les femmes doivent avant tout être de bonnes épouses et de bonnes gestatrices. Pourtant l’éducation des enfants ne leur incombe pas, elle est prise en charge par la communauté. Les hommes de leur côté se consacrent exclusivement à l’étude religieuse et laissent à leurs épouses le soin de subvenir aux besoins de la famille tout en leur interdisant de travailler. C’est pourquoi ces familles vivent principalement des dons et des prestations familiales.
Myriam avait souffert de la misère et de la faim dans son enfance. Dans son désir de fuite, elle voulait aussi échapper à cette précarité courante dans ces familles nombreuses et offrir une vie décente à ses enfants.
Le judaïsme hassidique a été créé comme une secte joyeuse où on y enseigne le clivage. Selon les principes inculqués, il existe deux mondes. Le leur constitue une enclave, où Dieu veille sur ses disciples, cernée par l’autre monde, le mauvais, celui des étrangers.
Elle savait qu’en quittant son foyer elle perdait tout et principalement l’affection de ses parents et de ses quatre enfants. Elle s’est rapidement rendu compte qu’en fuyant la communauté, ses membres feraient de sa vie un enfer. Elle a reçu plusieurs appels téléphoniques lui rappelant qu’elle n’aurait plus de relations avec eux.
Après trois ans de bataille juridique, elle est parvenue à obtenir 75% de la valeur de sa propriété. Le juge chargé de la procédure de divorce a pu démontrer que leur maison avait été achetée par le frère de Myriam afin que le couple puisse percevoir des allocations logement et qu’une partie de l’argent avait été versé sous forme de don à la communauté, ce qui constituait non seulement une fraude fiscale ais aussi une fraude aux allocations sociales de logement.
Myriam n’est pas encore parvenue à obtenir le divorce car selon les règles religieuses seul un homme peut divorcer d’une femme. Elle est néanmoins parvenue à reconstruire sa vie et s’est aperçue que la frontière obsidionale entre les deux mondes dont on lui avait parlé était purement imaginaire. Elle a rencontré d’autres juifs qui avaient une vie sociale et ne vivaient pas clivés, dont celui qui allait devenir le premier amour de sa vie.
(Source : Alliance, 09.12.2018)
1. Entièrement noirs, les vêtements du judaïsme hassidique sont identiques à ceux de la noblesse polono-lituanienne du XVIIe siècle et veulent donner l’image d’une classe respectable de propriétaires terriens.