John Neal, Joy Fluker ou encore Fonda Favors ont passé leur enfance au sein du groupe de prière House Of Prayer For All People basé en Floride. Aujourd’hui adultes, ils racontent ces années durant lesquelles ils furent soumis à l’emprise et la violence d’Anna Elizabeth Young, fondatrice de la communauté, surnommée « Mère Anna ». Chacun, dans son enfance, fut victime et témoin d’actes de maltraitances qu’ils ont, à un moment de leur vie, décidé de dénoncer. Anna Elizabeth Young a enfin été arrêtée.

Elle menait une existence tranquille depuis bientôt 15 ans alors qu’elle était accusée d’être responsable de la mort d’un enfant après l’avoir torturé et privé de nourriture, à la fi n des années 1980.

Pour beaucoup, ce drame n’est qu’un épisode de la vie de Mère Anna durant laquelle elle aurait semé l’horreur et la mort. Avant d’être « Mère Anna », elle était Anna Davidson, une infi rmière de Chicago qui vivait avec son mari Robert et leurs enfants. En 1973, le couple déclare que Cathy, une fille de Robert, a disparu alors que toute la famille se promenait dans un parc. Au moment des faits, la police avait été interloquée par l’attitude du couple qui ne semblait pas atteint par l’évènement mais les déclarations convergentes de l’ensemble des membres de la famille ne lui avaient pas permis d’inquiéter les parents.

Mais la donne a changé. Selon les récentes déclarations au FBI de Joy Fluker, fille d’Anna et demi- soeur de la petite fille, Cathy serait morte après avoir été battue, ligotée et bâillonnée dans l’appartement familial.

C’est à ce moment que ses parents ont déménagé dans le sud d’Atlanta et qu’est née la House Of Prayer For All People. Basée sur une version fondamentaliste de l’Ancien Testament, ses membres devaient, entre autres, suivre un régime prétendument imposé par le livre du Lévitique et les femmes porter de longues robes. En 1983, le groupe migre vers la Floride, dans une maison totalement isolée. Anna prend la direction et recueille des enfants principalement pour des raisons sociales ou médicales.

Fonda Favors était l’une de ces enfants. Elle se souvient être entrée dans la communauté avec sa mère et sa soeur dont elle fut rapidement séparée après avoir été rebaptisée Rachel. Elle fut tellement battue qu’elle s’était habituée à la douleur. En 1988, Robert Davidson meurt d’un accident de voiture et les sévices perpétrés par Anna s’intensifient.

Mais en 1992, le vent tourne. Des parents confient leur petite fille à Anna Elizabeth Young, parce qu’elle n’obtenait pas de bons résultats en classe. Ils pensaient qu’une éducation plus stricte lui serait bénéfique jusqu’au jour où l’enfant fut maintenue dans un bain d’eau de Javel au prétexte qu’elle sentait mauvais et qu’elle serait ainsi libérée du mal. Brûlée au second degré, ses parents l’ont retrouvée attachée à son lit. Reconnue coupable de maltraitance, Anna Young dissout le groupe et prend la fuite. Le FBI parvient à l’interpeller en novembre 2000 dans l’Illinois. Elle est condamnée à six mois de prison.

En décembre 2017, elle est de nouveau arrêtée lorsque sa fille Joy dénonce une affaire remontant aux années 1988-1989, la disparition du petit Emon Harper, rebaptisé Moïse par la gourelle. Elle a été rejointe par d’autres membres de la secte dont Sharon Batie qui a fait des révélations accablantes, déclarant avoir vu Anna Young battre le garçon, puis l’enfermer dans un placard durant trois jours sans aucune nourriture. Quand Sharon a trouvé le courage d’ouvrir le placard, l’enfant était mort.

Depuis l’arrestation, plusieurs autres anciens membres se sont présentés, disant aux autorités locales qu’ils avaient été torturés et maltraités.

Agée aujourd’hui de 76 ans et déjà condamnée en 2001, Anna Young ne paiera sans doute pas pour les faits trop anciens dont ces ex membres l’accusent mais ils auront au moins eu la satisfaction de pouvoir en parler. Pour Joy Fluker, sa mère est malade et a besoin d’aide. « Elle aime Dieu, je crois. Mais elle a l’esprit malade ». « Si les gens avaient parlé il y a longtemps, ces vies auraient pu être épargnées » dit-elle.

(Source : The Atlanta Journal-Constitution, 25.03.2018)